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QUESTION D'ACTU

Alimentation

Notre mode de consommation moderne n’est pas adapté à notre corps

Notre alimentation riche en calories et en glucides, notre sédentarité et l’abondance de nourriture est à l’exact opposé de nos ancêtres, qui mangeaient des aliments peu caloriques, qui bougeaient constamment pour se nourrir et qui faisaient face à des famines récurrentes.

Notre mode de consommation moderne n’est pas adapté à notre corps a_namenko/iStock




L'ESSENTIEL
  • Notre alimentation moderne est trop évoluée par rapport à notre corps, qui ne sait pas la gérer.
  • Elle serait la raison des maladies de civilisation que nous avons actuellement (diabète, obésité, maladies cardiovasculaires…)
  • Les populations avec un mode de consommation pastoral sont en meilleurs santé que ceux avec un mode de consommation citadin occidental.

Nos maladies alimentaires modernes ne viennent pas de nulle part. Elles seraient, selon les chercheurs de l’université de Princeton (Etats-Unis), le résultat d’une mauvaise adaptation de notre corps à la nature ultra transformée et des glucides que nous mangeons à profusion. Nos modes de consommation occidentaux seraient allés trop vite pour notre évolution, ce qui serait la cause de l’explosion des maladies actuelles que nous avons, comme l’obésité ou certaines maladies cardiovasculaires. Les résultats de leur étude ont été publiés le 21 octobre 2020 dans la revue Science Advances.

Une alimentation trop riche par rapport à notre évolution

Selon les chercheurs, la nourriture que nous mangeons dans les pays occidentaux n’est pas adaptée à notre métabolisme. Au cours des deux derniers siècles, la révolution industrielle et la modernisation de l’agriculture ont chamboulé notre façon de manger. Les aliments que nous consommons actuellement sont facilement accessibles, riches en calories, en sucre, en graisse et pauvres en légumes verts et en légumes secs. De fait, ils ne sont pas en adéquation avec nos rythmes de travail sédentaires. Ces deux facteurs combinés sont à l’origine de l’augmentation de l’obésité et des maladies cardiovasculaires qui frappent les pays occidentaux depuis près d’un demi-siècle.

Les chercheurs de Princeton partent du postulat que nos ancêtres avaient des modes de vie et de consommation éloigné du nôtre. Partout sur Terre, il y a toujours eu des populations avec des modes de vie agraires, pastoraux et de chasseurs-cueilleurs. Nos ancêtres n’avaient pas de nourriture présente en abondance, les repas n’étaient pas très caloriques, les situations de famine étaient communes, il fallait bouger en permanence pour trouver de quoi se nourrir, ce qui poussait leurs corps à puiser dans leurs réserves, car ils étaient conditionnés pour ça. 

Avec le mode de consommation alimentaire occidental, notre corps n’a pas eu le temps de s’adapter à tous ces changements. Il en résulte un décalage entre la physiologie humaine, qui a évolué pour faire face au mode de vie de nos ancêtres (régime à base de viande et de plantes, beaucoup d’activités physiques et des pénuries alimentaires) et celle de nos sociétés contemporaines (régime riche en calories, en glucide, en graisse et en sucre, de la sédentarité et de la nourriture à profusion). C’est ce décalage qui serait à l’origine du diabète, de l’obésité et des maladies cardiovasculaires que nous avons. 

Les humains ont évolué dans un environnement très différent de celui dans lequel nous vivons, indique Amanda Lea, post-doctorante de l’Institut Lewis-Sigler de génomique intégrative à l’université de Princeton et autrice de l’étude. Aucun régime alimentaire n'est universellement mauvais. Il s'agit juste de l'inadéquation entre notre histoire évolutive et ce que nous mangeons actuellement.

L’évolution des nouvelles populations mondialisées

Pour appuyer leur hypothèse, les chercheurs se sont penchés sur plusieurs populations. Ils ont notamment comparé les populations occidentales en Europe et aux Etats-Unis avec des peuples qui ont gardé une alimentation relativement proche de celles de nos ancêtres. 

Ils se sont ainsi intéressés aux Turkana, une population vivant dans un désert isolé au nord-ouest de Kenya et qui tient sa subsistance de son activité pastorale. Tout comme leurs ancêtres l’ont fait durant des milliers d’années, les Turkana pratiquent le pastoralisme dans des régions arides. Leur alimentation dépend en grande partie du lait frais ou fermenté de leur bétail. Ils mangent de la viande en petite quantité (essentiellement du dromadaire, du zébu, du mouton, de la chèvre et de l’âne) et prennent les calories dans la graisse et le sang de ces animaux. Occasionnellement, ils mangent des plantes sauvages et peuvent aller au marché pour acheter des céréales, du thé ou de l’huile. 

Cependant, avec l’essor de l’économie de marché, une partie des Turkana a abandonné la vie pastorale pour une vie de commerçants pour certains (qui vivent en fabriquant du charbon de bois et en vendant les produits réalisés par leurs animaux) et une complètement citadine pour d’autres. Grâce à cette situation unique de comparaison entre les Turkana pastoraux et les Turkana urbains, il est ainsi possible de comparer si le changement dans leur mode de consommation a une influence sur leur santé.

Nous avons réalisé que nous avions la possibilité d'étudier l'effet de la transition d'un mode de vie traditionnel, reposant sur près de 80 % de sous-produits animaux - une alimentation extrêmement riche en protéines et en graisses, avec très peu ou pas de glucides - à un régime alimentaire essentiellement composé de glucides, souligne Julien Ayroles, professeur adjoint d'écologie et de biologie évolutionniste à l’université de Princeton et chercheur principal de l’étude. Cela a présenté une opportunité sans précédent : des populations génétiquement homogènes dont le régime alimentaire s'étend sur un gradient de style de vie allant de relativement ‘assorti’ à extrêmement ‘non assorti’ à leur histoire évolutionniste récente.”

Les mêmes maladies que les Occidentaux

En comparant la santé des différents groupes de Turkana, les chercheurs ont pu constater que ceux qui avaient conservé leur mode de vie traditionnel et ceux qui s’étaient tournés vers le commerce étaient en excellente forme. En revanche, ceux installés dans les villes présentaient  tous des soucis cardiovasculaires, souffraient d’hypertension artérielle, de diabète ou d’obésité. Les résultats ont également montré que plus ils vivaient en ville, moins ils avaient tendance à être en bonne santé. 

Nous constatons plus ou moins ce que nous attendions, annonce Julien Ayroles. Le passage à ce régime à base de glucides rend les gens malades.” Sa collègue Amanda Lea abonde dans son sens. “Il y a un effet cumulatif. Plus vous faites l'expérience de l'environnement urbain — un environnement mal adapté à l'évolution — plus cela sera mauvais pour votre santé”. 

Toutefois, Julien Ayroles ne conseille pas d’adopter le même régime alimentaire que les Turkana pour autant. “Si vous et moi suivions le régime Turkana, nous tomberions très vite malades. La clé de la santé métabolique est peut-être d'aligner notre régime alimentaire et notre niveau d'activité sur celui de nos ancêtres, mais nous devons encore déterminer quels sont les composants les plus importants.

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