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Vieux légumes : une tendance faite pour durer ?

Les légumes oubliés ou vieux légumes, comme on les appelle souvent, sont revenus à la mode il y a des déjà plusieurs années. Ils s'invitent à nouveau à nos tables et nous permettent de diversifier notre alimentation.

Vieux légumes : une tendance faite pour durer ? Mariha-kitchen/iStock

  • Publié le 19.05.2021 à 12h00
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Panais, rutabagas, crosnes, topinambours… Après avoir séduit les plus grands chefs cuisiniers, ils s’invitent désormais dans les rayons de nos supermarchés. Autant de légumes tombés aux oubliettes dans la période de l’après-guerre et qui refont, depuis quelques années, leur apparition.

Prenez les topinambours, par exemple, nos grands-parents ne pensaient sûrement pas qu'ils reviendraient à la mode! Comme le rappelle le sociologue de l’agriculture et de l’alimentation, Eric Birlouez, ils ont en effet “remplacé la pomme de terre, réquisitionnée par les Allemands pendant la deuxième guerre mondiale, et donc été surconsommés par les Français pendant cinq ans”. Résultat : à la fin du conflit, ils sont rangés au placard. Et si l’on remonte plusieurs siècles en arrière, leur image n’est guère plus glorieuse. L’auteur de “Petite et grande histoire des légumes” raconte : “Le topinambour arrive en France au 17ème siècle, son petit goût de noisette plaît au début mais il est vite mis à l’index par les médecins qui ne le trouvent pas très intéressant sur le plan nutritif. En plus, il a l’image d’un aliment de carême et de pénitence, il n’est donc pas très consommé et rapidement réservé aux paysans pauvres jusqu’à l’arrivée de la pomme de terre, au 19ème, qui le remplace complètement”. Bref, pas de quoi affiller les papilles !

Même constat pour le rutabaga qui est tout aussi associé à la seconde guerre mondiale dans l’imaginaire collectif. Pour ce qui est des autres variétés de légumes anciens, les histoires varient mais le résultat reste le même : avant de repeupler les cuisines des grands chefs, personne (ou presque) n’avait envie d’y goûter.

Il a fallu attendre qu’ils soient  “vus à la télé” pour que leurs ventes augmentent considérablement. D’après Fabrice Robert, producteur de légumes anciens, “ça fait cinq ans que les gens ont commencé à acheter beaucoup plus de topinambours, panais, etc”. Il poursuit : “Quand j’ai commencé à en vendre il y a vingt ans, on me prenait pour un fou, la première année j’ai vendu 10 kilogrammes maximum de topinambours alors qu’aujourd’hui les légumes anciens représentent 20 à 25% de mes ventes ; les gens aiment bien, ça a du goût et ça sort de l’ordinaire”.   

C’est donc une histoire de mode mais pas seulement, leur bonne cote illustre une tendance bien plus large. Selon la nutritionniste Béatrice de Reynal, les crises à répétition tant économiques, que sociales ou sanitaires n’y sont pas pour rien. En “période de crise, on assiste à un retour aux racines et aux traditions”, or, les légumes anciens attirent par leur côté traditionnel. Comme le précise Eric Birlouez, “nos grand-parents en mangeaient déjà, ce côté traditionnel rassure” et pousse à l’achat.

Des produits bio et locaux

Côté attractivité, ils se distinguent des autres légumes parce qu’ils sont très souvent “cultivés en bio et en local” insiste Eric Birlouez. Effectivement, ce qui représentait autrefois leur point faible est aujourd’hui devenu leur point fort : “Leur culture avait été abandonnée parce qu’ils n’étaient pas suffisamment intéressants au regard des critères de l’agriculture moderne mais le fait qu’ils soient résistants au froid et aux maladies les rend facilement cultivables en bio”.

Ils sont donc produits en France et bio la plupart du temps, un atout non négligeable pour Bruno Parmentier. Et le spécialiste des questions agricoles et alimentaires va plus loin. Si ces légumes reviennent à la mode c’est avant tout “parce que l’on est allé trop loin dans la dictature des supermarchés, les circuits longs et la surproduction” et comme “on ne peut pas changer la planète, on change ce qu’il y au plus près de nous”, c’est-à-dire nos habitudes de consommation alimentaire. Cette tendance n’est pas non plus étrangère au mouvement écologique actuel : “C’est le même univers : le bio, le local, l’équitable, le “à l’ancienne” c’est un même mouvement culturel”. Même constat pour Fabrice Robert avec quand même quelques nuances : “au début c’était les bobos qui achetaient des légumes anciens, aujourd’hui la clientèle est plus variée, un peu tout le monde en achète d’autant plus qu’ils sont bio et produits localement”.

Manger des légumes anciens, c’est ainsi consommer responsable mais pas seulement, c’est aussi un moyen de varier son alimentation et de maximiser ses apports en fibres, vitamines, potassium, magnésium ou encore zinc. Arnaud Cocaul, nutritionniste, insiste sur “l’importance d’élargir son palais vitaminique”. De plus, remarque-t-il, incorporer des légumes anciens à son alimentation peut être une bonne alternative aux compléments alimentaires qui sont très en vogue actuellement. “C’est moins cher que les compléments alimentaires et c’est plus performant, les jeunes devraient s’y mettre” sourie-t-il.

L’autre avantage de ces légumes, rappelle Béatrice de Reynal, c’est qu’à l’instar des variétés les plus répandues, ils “permettent de remplir l’estomac sans être très caloriques”. Prenez le potiron, la courge ou le potimarron, par exemple, “ils sont lourds, denses mais peu caloriques” à condition de ne pas les faire frire....

Et quand à leur allure, c’est vrai qu’elle peut faire peur. Couleurs, racines : ils ne sont ni lisses, ni brillants comme nos éternelles courgettes et aubergines, mais ne fuyez pas ! Pas besoin d’être étoilé pour les préparer : une cocotte-minutes, dix minutes de cuisson maximum et un presse-purée et paf ils sont prêts. Et tout ça sans même avoir besoin de les éplucher (et oui, ils sont bio). Vous n’avez pas de presse-purée ? Pas de cocotte-minute non plus ? Pas de problème : faites-les cuire à l’eau et servez-les tièdes en vinaigrette. Simple, efficace et original!

Une mode toute en nuances

Seul petit bémol qui vient nuancer l’ampleur de la mode des vieux légumes : la difficulté à produire et consommer localement dans les grandes villes. En effet, acheter local en campagne c’est facile, dans une grande métropole où les bouches à nourrir sont plus nombreuses ce n’est pas toujours possible… Résultat, Bruno Parmentier tranche, oui les vieux légumes se vendent en plus grand nombre mais non leur consommation “ne deviendra pas majoritaire”.   D’autre part, s’amuse l’expert, ce qui fait leur force fait aussi leur faiblesse : ils plaisent surtout à une population qui “consomme bio et vote écolo”. Ajoutez à ça le fait qu’ils sont loin d’être vendus partout et plus chers que les légumes traditionnels, ils risquent fort, comme l’estime Eric Birlouez,  de rester une niche.

Total, l’hégémonie des racines sur le rayon des fruits et légumes ce n’est peut-être pas pour demain… Sauf si on les inclut dans les repas des enfants à la cantine. “Si les enfants aiment et en (re)demandent alors la tendance deviendra plus majoritaire” conclut Arnaud Cocaul. Mais ce n’est quand même pas gagné, si l’on en croit Fabrice Robert, les clients s’en lassent déjà. Prenez le panais par exemple, “sa vente ralentie déjà, on en a trop parlé, les gens veulent autre chose”. Et autre chose, c’est ce qu’il propose. Sa dernière trouvaille en date : l’aubergine japonaise.

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