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Décompression

Quel sport pour gérer quelle émotion ?

Quel sport privilégier lorsque qu’un sentiment de peur nous paralyse ? Ou qu’un coup de blues nous cloue au lit ? Quelqu’un en rogne doit-il vraiment se mettre à la boxe pour « se défouler » ? Deux spécialistes de l’émotion et un coach sportif nous en disent plus sur les activités physiques qui correspondent le mieux à son état d’âme du moment.

Quel sport pour gérer quelle émotion ? gorodenkoff/iStock

  • Publié le 07.12.2021 à 10h00
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« Respirer et marcher, c’est un bon début pour faire face à une émotion désagréable qui submerge », selon la psychothérapeute Catherine Aimelet-Perissol, co-auteure de Ma bible des émotions (éd. Leduc). Etymologiquement, d’ailleurs, le mot émotion signifie une mise en mouvement : dès qu’il y a émotion, il y a une invitation à bouger. Une petite balade digestive suffirait-elle à apaiser votre courroux ? Peut-être, mais il faut souvent aller plus loin, et jouer aux apprentis athlètes. Cela va sans dire, pratiquer une activité sportive permet de se sentir mieux dans sa peau. Pour six Français sur dix, cela constitue une « soupape de décompression » qui permet de faire une coupure avec sa vie personnelle/professionnelle, selon un sondage Ifop de 2020. Et pour cause, « tous les sports ont vocation à favoriser un équilibre émotionnel, autrement dit le sport diminue les grands écarts émotionnels », selon la spécialiste.

Rééquilibrer les « écarts émotionnels » ? Si je suis en colère, je devrais donc privilégier le yoga ou le tir à l’arc – un sport dit « calme », à l’opposé de mon émotion ? Alors pourquoi pas, mais ce n’est pas si simple. Devant chaque émotion, deux chemins s’offrent à chaque sportif : aller dans le sens de son émotion ou aller à contresens, sachant que les deux mènent à une meilleure santé psychologique. Si j’ai peur, je peux me tourner vers un sport rassurant et sans risque, comme la randonnée ou le chi-cong, ou au contraire vers un sport plus extrême, comme le kayak de rivière ou le parkour. C’est en réalité à chacun de déterminer quelle voie lui correspond le mieux pour gérer son trop-plein d’émotions. Et parce que personne ne s’est jamais plaint de ressentir trop de joie, cantonnons le sujet aux émotions désagréables, et les plus primaires, celles qui chapeautent toutes les autres, à savoir la peur, la colère et la tristesse.

Transi par la peur ? Reprenez confiance en vous !

Sports extrêmes et de combat. « Se confronter à des sports extrêmes peut être une manière de conjurer la peur, explique la psychologue Mariette Strub-Delain, auteure de Quand nos émotions déraillent (éd. Eyrolles). Certaines thérapies cognitivo-comportementales qui traitent des phobies invitent la personne à se rapprocher de ce dont elle a peur, avec un protocole qui l’amène à « rencontrer » ce qu’elle craint le plus, afin d’apprivoiser son émotion. Résultat, la personne prend conscience de la part de fantasmes que cela impliquait. Mais ce n’est pas une vérité générale : certains vont être encore plus terrorisés qu’avant ! » Donc non, il ne faut pas nécessairement se mettre au wing-suit pour gérer son angoisse. Cela peut aussi passer par des sports de combat, abonde la psychologue : « Ils permettent de se sentir plus fort, moins fragile, et donc d’avoir moins peur. Une femme qui pratique le krav-maga (sport d'auto-défense qui vient d'Israël) se sentira plus armée, plus équipée contre les dangers de tous les jours ».

Escalade versus tai-chi. « L’escalade, selon Catherine Aimelet-Perissol, peut amener la personne à vivre sa peur (pas la dépasser !) et donc de trouver des zones de sécurité à l’intérieur-même de l’expérience corporelle. D’autant plus que le grimpeur est encordé, dans un cadré sécurisé et sécurisant. Il va éprouver sa peur et, à partir de là, trouver les moyens, les ressources en elle pour avancer, coûte que coûte. » D’autres, pour tenter de gérer leur peur, pourraient plutôt avoir envie de pratiquer des sports moins acrobatiques, plus terre-à-terre si l’on peut dire, « avec un rapport au sol, comme le yoga, le tai-chi ou la danse ». L’objectif reste le même : retrouver une confiance en soi, en premier lieu physique. « C’est-à-dire retrouver, grâce aux sensations corporelles, une sorte de partenariat avec son corps : votre corps est votre allié. » Le travail du corps, justement, par la musculation et le fitness peut également être un bon outil de décompression pour apaiser ses craintes, selon le coach sportif Nicolas Norca : «Beaucoup arrivent en début de séance avec une estime de soi dans les chaussettes et repartent avec une énergie et une confiance débordante ».

Sujet à la colère ? Retrouvez la maîtrise de vous-même !

Squash, zumba et tir à l’arc. « Avec la colère, la question est d’évacuer la surcharge énergétique qu’elle implique : comment littéralement se décharger ?, explique Mariette Strub-Delain. Concrètement, tous les sports qui travaillent le cardio sont pertinents pour tenter de canaliser la colère, de déplacer vers autre chose : le squash, le badminton... » Pour ceux qui auraient envie de transpirer dans une atmosphère moins compétitive, « il y a aussi les sports un peu plus festifs, comme la zumba, pour amener la colère sur un terrain plus positif ». La psychologue recommande enfin « les arts martiaux, très ritualisés et cadrés, donc très contenants pour quelqu’un qui a l’impression d’être toujours en débordement ». Ou plus original, « le tir à l’arc, pour travailler la concentration et la maîtrise de soi ».

Sports d’équipe ou natation ? « La colère fait partie du registre identitaire : c’est toujours une histoire de place, en rapport avec la difficulté de trouver sa place en société, analyse Catherine Aimelet-Perissol. Ce qui régule le mieux la colère, ce sont donc les sports d’équipe (football, volley…). Ils exigent en effet un esprit de compétition (gagner peut apaiser ma rage), mais surtout de cohésion et d’empathie : je suis obligé de jouer collectif, de gagner ou de perdre mais tous ensemble. Certains sports qui demandent une compétition avec soi-même, un dépassement de ses limites, comme l’escalade ou la course à pied, peuvent également faire retomber la colère. » D’autres gens encore, et « notamment les hyperémotifs sujets à de grandes colères », peuvent tenter la natation : « l’eau a un effet apaisant. Nager, c’est solitaire mais cela apprend à respirer, à se calmer, à coordonner ses mouvements – sinon on coule ! » En revanche, la boxe ne serait pas forcément idéale : si cela peut « vous défouler » sur le court terme, cela peut aussi « vous empêcher de redescendre ».

Yoga contre sports de combat. « D’expérience, il faut plutôt une activité à l’opposé de celle que vous ressentez : en cas de colère, privilégiez le yoga », conseille le coach Nicolas Norca. Avant de nuancer : « Attention, ce n’est pas une science exacte. Il faut d’abord « écouter son corps : qu’est-ce qui me procure une sensation de mieux-être ? Cela peut être un sport ludique, mais aussi une activité de haute intensité, qui demande une dépense d’énergie importante et grosse décharge hormonale… » Certains vont donc s’orienter vers des sports de combat pour « se libérer, tenter d’expulser la violence en eux », d’autres au contraire vers des activités « plus calmes (je ne dis pas moins difficiles !) comme le yoga, où ils vont apprendre à maîtriser cette colère, ou du moins ne pas se laisser happer par elle »

Accablé par la tristesse ? Visez l’enthousiasme !

Marche et ski alpin. « La tristesse est surtout une affaire de sens : quel sens je donne à ma propre existence et donc à mon corps, explique Catherine Aimelet-Perissol. Les personnes tristes sont souvent très cérébrales, chargées de questions existentielles (chercher du sens, vouloir comprendre…). Donc l’idéal serait de faire une activité physique qui les ramènerait sur terre, en rapport avec la matière ou le sol, quelque chose de tangible. » Par exemple, la marche à pied ou le yoga (oui, ce dernier sport revient souvent). Mais les mordus de sensations fortes pourraient aussi retrouver un peu de joie de vivre en pratiquant une activité « qui les grise, comme le ski alpin : il y a une dimension de plaisir immédiat qui peut nous réenchanter ».

Equitation. « Triste, on est plutôt replié sur soi, donc on n’a pas trop envie de reprendre une activité en groupe, estime Mariette Strub-Delain. Oubliez la zumba, donc, je conseille plutôt des sports en lien avec des animaux, comme l’équitation, même si c’est difficilement accessible. Cela peut réconforter et permettre de se sentir moins seul, et ce sans forcément passer par la parole. » Moins onéreux que l’équitation, on peut aussi aller courir avec son chien dans les bois, ou nager parmi les poissons !

Tous les sports... ? En soi, tous les sports sont bons à prendre pour quelqu’un de dépressif, car n’importe quel sport rend heureux, rappelle Nicolas Norca « C’est biologique. Après une activité sportive intense, le corps sécrète des hormones du plaisir (endorphines, sérotonine…), et vous ressentez un état de bien-être physiologique et psychologique, moins de pensées négatives, plus d’estime de soi. » Le bonheur en somme. Moins cher qu’un psy, la thérapie par la sueur !

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