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Voyage onirique

Comment prendre le contrôle de ses rêves ?

Au cours d’un rêve classique, nous pensons vivre les choses de façon réelle. Un rêveur lucide, lui, sait qu’il est en train de dormir, si bien qu’il peut être capable de contrôler son imaginaire et orienter son songe. On vous explique comment tenter d’y parvenir avec des spécialistes de l’onirisme.

Comment prendre le contrôle de ses rêves ? YakobchukOlena /iStock

  • Publié le 13.12.2021 à 10h00
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Voler au-dessus des montagnes, se transformer en super-héros justicier ou accomplir ses fantasmes sexuels les plus fous : même en rêve, ce n’est pas donné à tout le monde. La plupart des gens rêvent comme des spectateurs, autrement dit ils regardent le « film » de leurs rêves. Le rêveur lucide, lui, va beaucoup plus loin : ayant pleinement conscience de rêver, il peut aller jusqu’à prendre le contrôle total de son imaginaire et influer sur son rêve. Il est comme le réalisateur ou le scénariste du « film » : omnipotent ou presque.

Avec en moyenne 100.000 rêves dans une vie et cinq rêves par nuit, ça fait envie. Mais bon voilà, selon plusieurs études scientifiques, si une personne sur deux environ fait un rêve lucide au moins une fois dans sa vie, ceux qui arrivent à en faire régulièrement ne représentent que 2 % de la population. Bonne nouvelle, il y a quelques astuces pour se conditionner et tenter de faire partie de l’élite onirique.

Apprendre à se souvenir de ses rêves

C’est la première étape à passer pour atteindre le rêve lucide. Si nous ne nous souvenons pas toujours bien de nos rêves, c’est parce que nous sommes programmés pour être capables de distinguer le rêve de la réalité. Pourtant, au-delà des impératifs évidents (dormir suffisamment et ne pas consommer de substances psychoactives), plusieurs techniques existent pour stimuler la mémoire de ses rêves. Il y a les méthodes de respiration et de visualisation ou encore le flash-back : avant de dormir, se remémorer tous les moments de la journée, du soir jusqu’au matin, pour que l’esprit le matin se branche automatiquement sur ce qui s’est passé pendant la nuit. La vitamine B6 est aussi réputée pour aider à la mémorisation, selon une étude de 2018.

Mais la technique la plus connue reste le « journal de rêves », assure Jean Baptiste Maranci, psychiatre spécialisé dans les pathologies du sommeil à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. « Tous les matins, dès le réveil, restez dans la même position allongée et essayer de vous souvenir de votre rêve, puis notez-le dans un carnet avec le maximum de détails (la situation, vos sensations, vos émotions…). Cela peut augmenter le nombre de rêves dont on se souvient, et in fine la probabilité d’en faire des lucides. »

Noter ses rêves a notamment aidé Alexandre, la trentaine, à mieux les conscientiser. « Au début c’était contraignant, mais au bout de trois semaines, j’écrivais des pages et des pages ! C’est vraiment venu en le faisant. A force de les écrire, j’ai réussi à me rappeler de trois rêves par nuit ! Et c’est lorsque j’ai commencé à bien m’en souvenir que j’ai commencé à repérer des détails récurrents, des éléments communs à tous mes rêves, et donc à me rendre compte que j’étais dans un rêve. »

Prendre conscience que l’on est en train de rêver...


...PAR LA TECHNIQUE DU TEST DE RÉALITÉ

C’est la définition stricte du rêve lucide : être conscient que l’on rêve quand on rêve. Pour en arriver là, une première méthode consiste à faire, tout au long de la journée, ce qu’on appelle des « tests de réalité ». Par exemple, prenez l’habitude de regarder vos mains : « Si vous êtes dans la réalité, elles seront normales, mais si vous êtes dans un rêve, leur texture, leur couleur ou encore le nombre de doigts seront souvent différents », explique Jean-Baptiste Maranci. « L’idée est de faire le test quand on est en éveil, une fois toutes les deux heures, au point que cela devienne presque un réflexe. Comme on rêve de ce qu’on vit, vous allez finir par reproduire le même geste dans vos rêves, et ainsi prendre conscience que vous êtes en train de rêver. »

Dans la même logique, vous pouvez aussi regarder une page de texte, détourner votre attention ailleurs, puis revenir sur la page : « Si le texte est le même, vous êtes dans la réalité, sinon vous êtes dans un songe, car le cerveau du rêve ne peut pas retenir autant d’informations contenues sur une page », précise le médecin. Se boucher le nez et la bouche peut également être une manière de palper la réalité, car « dans un rêve, on peut malgré tout respirer ». Certaines applications comme Awoken ou Lucidity proposent même des « vérificateurs de réalité » utilisant des repères sonores.

... PAR L'INDUCTION

Pour parvenir à se conditionner, une autre technique a fait ses preuves, selon le spécialiste. Elle s’appelle « induction mnémonique des rêves lucides », et c’est un peu contre-intuitif : il s’agit de… se réveiller ! « Mettre le réveil à 4 ou 5h du matin, se rappeler qu’on est censé faire un rêve lucide, puis se rendormir immédiatement : vous aurez plus de chances de faire un rêve lucide car vous serez dans la phase de sommeil paradoxal, durant laquelle se produisent les rêves. »

Si la perspective d’être tiré du sommeil avant l’heure H ne vous enchante pas, vous pouvez tenter de vous « induire » le rêve lucide avant de dormir, en vous répétant chaque soir « cette nuit je vais avoir conscience que je suis en train de rêver » ou une phrase similaire, jusqu’à plonger dans l’état de sommeil. A terme, il deviendra plus facile pour votre inconscient de « repérer les éléments bizarroïdes, les décalages, les absurdités qu’on imagine habituellement dans ses rêves, et donc de prendre conscience que vous rêvez ».

C’est arrivé à Sylvie, 55 ans, qui raconte la seule fois où elle a atteint le rêve lucide… l’histoire d’un instant. « Je suis en train de courir quand tout à coup, je tombe d’une falaise. Je chute d’une dizaine de mètres avant de me rattraper à une corniche d’une seule main. Et c’est là, suspendu dans le vide, que j’ai réalisé que ça ne pouvait être qu’un rêve : l’absurdité de la scène, ma force surhumaine... c’était surréaliste. J’ai alors lâché prise pour me laisser tomber, sachant pertinemment que j’allais me réveiller – et c’est ce qui s’est passé. Avec le recul, j’aurais dû essayer de m’envoler, de sauter ou quelque chose d’un peu fou comme ça. »

Prendre le contrôle de son rêve pour l’orienter

C’est l’étape supérieure, presque bonus, celle qui permet d’atteindre un degré tel de lucidité que, doté d’un véritable libre-arbitre, on peut décider du contenu de son rêve. Et quand on sait que l’imagination n’a aucune limite… C’est bien évidemment l’étape la plus difficile à passer, car « souvent l’euphorie de réaliser qu’on est en train de rêver provoque instantanément l’éveil », rappelle Tristan-Frédéric Moir, psychanalyste et expert du langage des rêves.

Pour se maintenir dans le songe et peut-être en changer le cours, il faut réussir à « mettre en balance les deux mondes, à conceptualiser qu’il y a celui du rêve et celui de la réalité ». Et surtout, ne pas s’emballer : « Les premières fois, n’essayez pas tout de suite de faire des choses extraordinaires, trop éloignées du rêve que vous êtes en train de faire. Restez dans le même environnement : si vous vous baladez sur un chemin, n’essayez de vous envoler, continuez simplement à marcher ! Habituez-vous en douceur à l’idée que vous êtes conscient. » Une dernière chose : « N’essayez pas de rester à tout prix, dites-vous que ça peut être progressif : la première fois restez-y quelques secondes, la deuxième fois trente, puis une minute… »

Pour contrôler ses rêves, on peut enfin recommander, un peu à contrecœur, d’en faire de mauvais… En effet, c’est « un peu grâce aux cauchemars » que Robin, 31 ans, rêveur lucide régulier depuis son enfance, a appris à l’être. « J’étais souvent poursuivi, et parce que je devais fuir, je devais créer les conditions pour. En m’envolant par exemple : j’étais dans un tel niveau de stress que je devais voler à tout prix ! J’y suis arrivé en faisant une sorte de brasse dans les airs. Un ami, lui, c’est en courant dans une pente comme en parapente. Par nécessité de fuir, je faisais aussi apparaître des objets comme une voiture. Ou de la télékinésie pour repousser les dangers. Contrôler mes cauchemars m’a permis de ne plus en avoir peur »

Exorciser ses cauchemars, c’est d’ailleurs le « principal intérêt thérapeutique des rêves lucides connu à ce jour », affirme le psychiatre Jean-Baptiste Maranci. « On peut lutter contre les cauchemars récurrents en modifiant le cours du rêve. Cela peut aussi aider les personnes souffrant de dépression ou de troubles de l’humeur, même si ce n’est pas systématique. » Au-delà des mauvais rêves, c’est donc avant tout sur la santé morale que le rêve lucide joue : « C’est toujours plus agréable de se réveiller après un rêve intense et plus que vrai. Cela peut même en inspirer certains, renforcer leur créativité, notamment chez les artistes. » Le réalisateur ou le scénariste de vos rêves, on vous a dit !
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