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Coup de blues, douleurs articulaires, insomnies : et si vous étiez entrée dans la « périménopause » ?

Alors que de nombreux Français ignorent encore l’existence même de la "périménopause", le Dr Brigitte Letombe, gynécologue médicale et membre du nouveau collectif "All for ménaupose", nous explique tout ce qu’il faut savoir sur cet état potentiellement précoce et très handicapant.

Coup de blues, douleurs articulaires, insomnies : et si vous étiez entrée dans la « périménopause » ? Kateryna Onyshchuk / istock.

  • Publié le 17.03.2023 à 10h00
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- Mieux Vivre Santé : Qu’est-ce que la "périménopause" ?

Brigitte Letombe - On appelle "périménopause" les deux ou trois années pendant lesquelles la fin des règles provoque un dysfonctionnement ovarien.

Dans l’imaginaire collectif, la fonction reproductive des femmes s’arrête de travailler d’un jour à l’autre, alors que c’est un processus lent et progressif.

 - A quel âge peut-elle survenir ?

La moyenne d’âge de la ménopause est de 51 ans, donc la périménopause commence généralement vers 47/48 ans. Néanmoins, certaines femmes sont ménopausées plus tôt, et peuvent donc entrer en périménopause dès 45 ans.

- Combien de femmes sont-elles touchées par ce phénomène ?

Même s’il n’existe pas de pourcentage précis pour le moment, je dirais que la périménopause touche au moins une femme sur deux. Ce n’est pas un phénomène marginal.

- Depuis combien de temps le corps médical a-t-il identifié cet état ?

Depuis toujours, mais c’est un état qui s’accentue aujourd’hui car de plus en plus de femmes ne prennent pas la pilule. Il y a 20 ans, le problème ne se posait pas car les symptômes étaient régulés via ce contraceptif.

- Quels sont les symptômes de la périménopause ?

C’est une période généralement difficile à traverser, que je qualifierais de véritables "montages russes hormonales". La périménopause peut se manifester via :

- des cycles menstruels plus courts et irréguliers ;

- des troubles du sommeil, de la mémoire, de la concentration et de l’humeur (avec l’installation d’un climat dépressif ou à l’inverse d’une certaine surexcitation) ;

- de l'irritabilité, des sueurs nocturnes, des bouffées de chaleur, des douleurs mammaires, des gonflements, des problèmes articulaires, de la fatigue et une accumulation de graisse au niveau du ventre.

L’intensité et la nature de ces manifestations sont très variables d’une femme à l’autre.

- Que faire si on les ressent ?

Il faut consulter un gynécologue, car il dispose d’un certain nombre de traitements pour atténuer les symptômes de la périménopause.

Nous pouvons par exemple proposer une contraception hormonale afin de bloquer le fonctionnement ovarien et d’éviter ainsi tous les dérèglements évoqués plus haut, à condition que la patiente n’ait aucun facteur de risque cardiovasculaire et qu’elle ait déjà pris la pilule auparavant. On peut aussi donner des pilules progestatives sans risque vasculaire et gérer les périodes d’hypoœstrogénie avec un petit peu d’œstradiol chez les femmes porteuses d’un stérilet hormonal.

Je précise qu’il ne s’agit pas là de soins standards mais de démarchent médicales qui doivent être adaptées par le gynécologue à chaque patiente.

- La périménopause est-elle bien prise en charge aujourd’hui en France ?

Non, absolument pas.

- Pourquoi ?

Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène. D’abord parce que beaucoup de femmes et de médecins généralistes sont mal informés et ne relient pas aux symptômes cités plus haut la périménopause, donc ne les traitent pas. Ensuite parce que cette période est encore très taboue en France, et que de nombreuses patientes n’osent pas en parler à leur entourage ou à leurs soignants. Par ailleurs, suite à la médiatisation de plusieurs cas de violences gynécologiques, un certain nombre de Françaises ont désormais peur de nous consulter. J’ajouterais à tout cela que les gynécologues médicaux sont de moins en moins formés, donc de moins en moins nombreux et de moins en moins accessibles. Enfin, de plus en plus de citoyennes ne veulent tout simplement pas prendre de traitement à base d’hormones, notamment à cause de la parution de l’étude américaine WHI.

- Pouvez-vous nous en dire plus sur cette étude ?

C’est une grande étude randomisée qui a démontré il y a une vingtaine d’années que la prise de traitement à base d’œstrogènes augmentait le risque de développer des problèmes cardiovasculaires graves comme les infarctus, les AVC ou les embolies pulmonaires. Sauf que les tests et le suivi ont été faits sur des femmes parfois malades ou trop âgées et que le traitement par voie orale n’a pas été donné de la bonne façon, biaisant ainsi les conclusions.

Toutes les études qui ont été menées par la suite sur l’administration de petite quantité d’œstradiol par voie transdermique en début de ménopause ont démontré que ce traitement faisait au contraire baisser le risque cardiovasculaire, mais le mal était fait.

- Que faudrait-il faire selon vous pour améliorer la prise en charge de la périménopause en France ?

A mon sens, les médias ont d’abord un rôle important à jouer dans la transmission des informations sur la périménopause. En Angleterre, les choses ont commencé à bouger suite aux témoignages de deux célèbres présentatrices télévisées, et les Britanniques sont aujourd’hui très avancés sur la question (tout comme les Américains, les Canadiens et les Australiens).

Tout médecin examinant une femme dans la quarantaine devrait aussi selon moi être capable de lui parler de la périménopause et de ses symptômes afin de pouvoir les identifier, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.

- Sentez-vous une évolution des pouvoirs publics sur le sujet ?

Oui, j’ai l’impression qu’il y a un petit frémissement. Je viens par exemple d’être auditionnée par le Sénat sur le thème "les femmes au travail", et on m’a demandé à cette occasion de parler de la périménopause.

- Faut-il parler de la périménopause à son conjoint ?

Absolument ! Taire cette transformation est un mauvais réflexe, malheureusement encore très courant au sein des couples. J’ai encore diagnostiqué une femme récemment, et la dernière chose qu’elle m’a dite à la fin de la consultation, c’est : "je ne vais pas en parler à mon mari".

Il ne faut plus avoir honte d’entrer en périménopause, et inclure les hommes dans ce processus naturel est nécessaire pour en arriver là.

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