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L'interview du week-end

Cabines de téléconsultation : «un danger pour les patients, si c’est de la médecine au rabais !»

Face à la désertification médicale, plusieurs collectivités investissent dans des cabines de téléconsultation pour pallier le manque de médecins dans les territoires. Ces dispositifs connectés sont décriés par certains professionnels de santé, qui s’inquiètent concernant la santé et la qualité de prise en charge des Français. Franck Baudino, médecin et fondateur de Health For Development, nous explique dans quel cas ces outils peuvent faciliter l’accès aux soins.

Cabines de téléconsultation : \ Geneviève Andrianaly




- Pourquoi docteur : Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, l’usage de la téléconsultation a explosé. Et pour cause, 22 % des Français sont devenus utilisateurs réguliers et satisfaits des téléconsultations après le premier confinement, alors qu’ils n’étaient que 7 % à y avoir eu recours avant, selon une enquête de France Assos Santé publiée en septembre 2021. Les citoyens continuent-ils à consulter un généraliste depuis une cabine ?

Franck Baudino : Les Français continuent de se servir de nos cabines de téléconsultation. D’après nos données, environ 3.000 passages ont été recensés depuis leurs installations dans les collectivités. Ces dispositifs, utilisés majoritairement par des plus de 60 ans et des femmes, ont aidé à désengorger les hôpitaux, car sans ces derniers, 45 % des citoyens se seraient rendus aux urgences. En clair, ces outils ont permis aux établissements de santé de gagner 47 % de leur temps. Grâce à ces dispositifs, 30 % des patients ont de nouveau été intégrés dans le parcours de soins coordonnés.

- Où trouve-t-on vos cabines de téléconsultation ?

En général, on choisit, avec les élus qui nous ont contacté, d’installer nos cabines de téléconsultation dans les mairies, à savoir des lieux accessibles. C’est le cas, par exemple, à Ballainvilliers, une ville en Essonne qui a vu le départ de plusieurs médecins. Certains de nos dispositifs sont localisés dans des entreprises, des hôpitaux et même des universités.

- Qui peut avoir recours à ces dispositifs ? N’excluent-ils pas les personnes âgées qui ont du mal à se faire aux nouvelles technologies ?

Tous les Français peuvent utiliser nos cabines, sauf les enfants de moins de 6 ans, pour qui les outils ne sont pas adaptés, et les adultes atteints de troubles neuropsychiatriques. Les personnes âgées, qui peuvent rencontrer des difficultés numériques lors de la téléconsultation, peuvent être aidées par un référent, qui est sur place lors de chaque rendez-vous.

- Comment prendre un rendez-vous ?

Les patients, qui n’ont aucun frais de santé à avancer, peuvent réserver un créneau en ligne ou prendre un rendez-vous par téléphone. À ce moment-là, ils doivent indiquer l’objet de la consultation. Si le malade a une douleur thoracique, des difficultés respiratoires ou souffrent de vomissements répétés, il lui est recommandé se rendre à l’hôpital.

- Comment se déroule la téléconsultation dans la cabine ?

Il existe deux modes d’utilisation. La première est une téléconsultation clinique. Dans ce cas, le patient n’est pas livré à lui-même. Un médecin, qui a suivi une formation en téléconsultation médecine, guide le patient en visioconférence pour qu’il puisse prendre sa tension ou observer de plus près son grain de beauté. Dans la cabine, on retrouve un tensiomètre, un oxymètre, un thermomètre, un stétoscope, un autoscope, un dermatoscope et même un électrocardiogramme. À la fin de la téléconsultation, le généraliste peut délivrer une ordonnance et un compte rendu pour le médecin référent, directement imprimés dans la cabine.

Le deuxième mode d’utilisation est le "check-up". Dans cette situation, le malade regarde une vidéo qui le guide pour prendre ses constantes physiologiques. Ce bilan de santé aide le médecin référent dans la prise en charge du malade. Par exemple : le praticien peut demander au patient de prendre sa tension deux fois par semaine dans la cabine et interpréter les résultats des tests depuis son cabinet.

- Quels sont les maux qui peuvent être détectés ?

La téléconsultation permet de diagnostiquer principalement des maladies cardiovasculaires, des otites, des petits problèmes de peau et parfois même des tumeurs.

- Dans quel cas les patients sont-ils orientés vers un spécialiste ?

Si le médecin en visioconférence n’est pas en mesure de résoudre le problème du patient, il l’oriente directement vers un spécialiste. Si le malade revient plusieurs fois dans la semaine, le généraliste arrête de lui délivrer une ordonnance et l’incite à consulter un spécialiste.

- Les cabines de téléconsultation ont mauvaise presse auprès de nombreux professionnels de santé. Ils jugent que ces dispositifs ne sont pas une solution contre la désertification médicale, mais de la "sous-médecine". Ces outils dégradent-ils la qualité de la prise en charge des patients ?

Ils ont raison ! Toutes les cabines disponibles sur le marché ne sont pas certifiées et ne permettent pas de suivre l’état de santé des patients. Ces dispositifs ont un sens uniquement si les malades intègrent un parcours de soins coordonnés et bénéficient d’un programme de prévention personnalisé.

- Va-t-on se diriger vers une banalisation des soins ?

Peut-être. Et alors ? Si cela permet aux patients d’être mieux soignés et d’être des acteurs de leur santé, je ne vois pas le problème. En revanche, je suis contre les consultations à la va-vite. Ces cabines peuvent représenter un danger pour les patients si c’est de la médecine au rabais !

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