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QUESTION D'ACTU

Rapport d’experts

Contrefaçon de médicaments : du citoyen au crime organisé

Escroqueries individuelles, réseaux internationaux, cybercriminalité, l’Institut de recherche anti-contrefaçon de médicaments publie une typologie des acteurs du trafic illicite.

Contrefaçon de médicaments : du citoyen au crime organisé JOBARD/SIPA




Mieux connaître son ennemi pour mieux le combattre, c’est ce que tente de mettre en œuvre l’Institut de recherche anti-contrefaçon de médicaments (Iracm). Cette association, créée en 2010 à l’initiative du groupe Sanofi, publie aujourd’hui un rapport détaillé sur les différentes organisations criminelles impliquées dans la contrefaçon de médicaments. La cybercriminalité ou les grands réseaux du crime organisé cachent aussi des acteurs plus discrets du trafic de faux médicaments : les industriels du secteur masquant des pratiques illicites derrière une activité légale de façade et des individus isolés attirés par un trafic simplifié par les outils internet et lucratif.

Sur internet, 1 médicament vendu sur 2 est un faux

L’Organisation mondiale de la santé estime que la moitié des médicaments vendus sur internet est contrefait. La cybercriminalité s’intéresse en effet au marché du médicament depuis de nombreuses années, notamment via des activités de distribution et de promotion en ligne de produits contrefaits. Parmi les exemples cités dans le rapport de l’Iracm, le réseau russe Glavmed a généré 18 milliards de spams par jour pour promouvoir par mail des médicaments contrefaits. Une activité très lucrative puisque les revenus mensuels du réseau étaient de l’ordre d’un million d’euros par mois. « Ce type de cybercriminalité organisée laisse souvent l’impression, à tort, d’une criminalité « moins dangereuse » auprès de l’opinion publique alors qu’elle est d’autant plus difficile à combattre en raison du caractère mouvant et infini d’internet », souligne l’Iracm dans un communiqué.

Outre cette criminalité 2.0, les acteurs du trafic de faux médicaments ont des tailles et des profils très différents. Les grands réseaux transnationaux qui se livrent à toutes sortes d’activités illicites s’intéressent également de près au trafic très lucratif de médicaments. Et s’ils n’ont longtemps contrefaits que des médicaments dits de confort, ils s’attaquent désormais aux traitements lourds. Ainsi, la filière jordano-chinoise, le plus grand réseau aujourd’hui en activité selon l’Iracm est en passe de devenir le spécialiste du traitement anti-cancéreux contrefait.

Derrière une activité licite de façade, des criminels en col blanc

L’Europe est plus spécifiquement concernée par ce que l’Institut de recherche anti-contrefaçon de médicaments appelle « la criminalité en col blanc ». Des entreprises souvent liées au secteur de la santé, par exemple des importateurs de médicaments ou des grossistes, développent des activités de distribution de contrefaçons derrière une activité licite de façade.
C’est exactement le cas de Peter Gillespie, un importateur de médicaments britannique emprisonné en 2011 pour avoir distribué plusieurs dizaines de milliers de contrefaçons dans le circuit légal de vente de médicaments. Des patients traités entre autres pour cancer de la prostate, schizophrénie ou en prévention d’un infarctus ont ainsi reçu pendant plusieurs mois entre 2006 et 2007 des médicaments contrefaits en Chine mais crédibilisés par un packaging et des codes-barres français. C’est la découverte par un grossiste de numéros de lots imprimés à l’envers qui a permis de mettre au jour la contrefaçon en mai 2007.

Une opportunité lucrative pour des citoyens ordinaires

« C’est une évolution préoccupante : aujourd’hui tout citoyen peut monter avec facilité un réseau illicite grâce à internet mais aussi grâce à des outils liés au commerce international », souligne Eric Przyswa, chercheur associé au Centre de recherche sur les risques et les crises de Mines Paris Tech. Importer des médicaments contrefaits d’Inde ou de Chine pour les revendre sur le web, cette méthode simple et lucrative peut séduire des individus isolés, attirés selon l’Iracm par « une façon simple de se faire beaucoup d’argent en prenant peu de risques ».
Le rapport souligne que le système de santé français reste encore relativement protégé mais cite notamment l’exemple d’un couple de ressortissants chinois qui vendait dans sa boutique parisienne 400 médicaments contrefaits importés illicitement de Chine via son réseau familial.  

Face à des profils si différents de trafiquants de faux médicaments, l’Iracm plaide dans son rapport pour des réponses répressive et préventive plus adaptées à chaque cas. Il évoque notamment le renforcement des audits de la supply chain du médicament en Occident pour identifier les acteurs industriels jouant double jeu sur la vente licite et la contrefaçon de médicaments. Face aux réseaux transnationaux, il appelle à des logiques de lutte plus coopératives entre Etats pour plus d’efficacité. Enfin face à la cybercriminalité, les experts plaident pour un renforcement et une harmonisation des normes encadrant les sites légaux de vente en ligne mais aussi pour des initiatives pro-actives qui associeraient les internautes patients-consommateurs à cette lutte contre la fraude.

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