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Dépendance, toxicité...

Cannabis : les effets sur le long terme désormais connus

Deux études mettent en exergue les effets du cannabis sur le long terme. Les conséquences neurologiques et psychiatriques incitent de plus en plus de consommateurs à consulter.

Cannabis : les effets sur le long terme désormais connus Karl Schoendorfer/REX/REX/SIPA




Le cannabis a fait couler beaucoup d’encre. Depuis que sa consommation a explosé, dans les années 1990, les études se multiplient pour déterminer les risques sanitaires et psychosociaux liés à l’usage de ce produit stupéfiant. Alors qu’un mouvement de libéralisation s’engage aux Etats-Unis, les équipes du National Institute on Drug Abuse dressent un état des lieux de la recherche sur le cannabis dans les colonnes du New England Journal of Medicine. Désormais, on connaît de manière plus précise l’impact du cannabis sur le long terme.

Risques de dépendance
C’est certainement l’un des points les plus éclairants de cette étude. Selon les auteurs, près d’un consommateur sur dix (9%) développe une addiction. Pour les utilisateurs qui ont commencé à l’adolescence, ce taux peut grimper jusqu’à 17%, 25 à 50% pour les fumeurs quotidiens. Des chiffres qui font relativiser l’idée qu’il s’agirait d’une « drogue douce »…

Le cannabis est-il une porte d’entrée vers d’autres drogues ? « Possible », selon les auteurs, qui se montrent beaucoup moins tranchés sur ce point. L’alcool et le tabac pourraient avoir le même rôle, et il semble encore difficile de distinguer ce qui relève du parcours individuel et ce qui a trait aux caractéristiques intrinsèques du produit.

Impact sur le Q.I
L’impact du cannabis est avant tout neurologique, affirment les auteurs qui rappellent la vulnérabilité du cerveau, notamment lors de son développement pendant l’adolescence. Ainsi, plusieurs études montrent que la consommation de marijuana agit directement sur le précuneus, la région cérébrale impliquée dans la vigilance et la conscience de soi, ainsi que sur l’hippocampe, impliquée dans l’apprentissage et la mémorisation.

Les adultes ayant régulièrement fumé du cannabis au cours de leur adolescence présentent une connectivité neuronale diminuée, expliquent les auteurs qui observent « une association entre usage fréquent (…) et déclin significatif du QI ». Ces symptômes apparaissent d’ailleurs sur le court terme : désorganisation de la mémoire, altération du jugement, difficultés à se concentrer…

Effets psychiatriques
Si l’usage du cannabis est bel et bien associé à un risque accru d’anxiété et de dépression, « la causalité n’a pas été établie ». Il semblerait plutôt que la marijuana exacerbe le cours de certaines maladies psychiatriques chez des sujets présentant une vulnérabilité génétique, notamment chez les schizophrènes.

Chez ces sujets à risque, le cannabis peut générer des épisodes psychotiques de manière prématurée (entre 2 à 6 ans).

Décrochage scolaire
L’étude passe en revue plusieurs risques psychosociaux liés à la consommation de marijuana : échec scolaire, faibles revenus à l’âge adulte, recours accrus aux services sociaux, chômage, criminalité et moindre réalisation personnelle dans l’existence… Mais les auteurs nuancent ce constat, en raison des multiples facteurs confondants.

A ce sujet, le Lancet Psychiatry a publié une étude très complète, qui analyse l’impact du cannabis sur la scolarité. Une équipe australienne a passé en revue les résultats de trois grandes études longitudinales, qui ont inclus plus de 3 700 jeunes de 17 ans. Les fumeurs quotidiens paient le prix le plus lourd : la probabilité qu’ils achèvent leur parcours scolaire dans le secondaire, ou qu’ils obtiennent un diplôme universitaire, est réduite de 60 %.

Effets respiratoires et cardiovasculaires
De faibles taux de cannabis ne semblent pas avoir d’effet significatif sur les voies respiratoires et le système cardiovasculaire. Cependant, les auteurs notent une prédominence des infections respiratoires et des pneumonies chez les fumeurs réguliers.

« On ne peut exclure une association positive entre la marijuana et cancer du poumon, mais les résultats suggèrent que le risque est plus faible avec la marijuana qu’avec le tabac », avancent les auteurs.

Sur le plan cardiovasculaire, ils font preuve d’autant de prudence. La littérature existante mentionne une association entre consommation de cannabis et risques accrus d’AVC, AIT et infarctus. « Mais les mécanismes sous-jacents aux effets de la marijuana sur les systèmes cardiovasculaire et cérébrovasculaires sont complexes et imparfaitement compris », concluent les auteurs.

Les consommateurs prennent ces risques au sérieux
Avec ces différentes mises au point de la littérature, difficile pour les consommateurs de faire la politique de l’autruche. Beaucoup s’alarment du caractère addictif de cette drogue et de ses effets sur leur santé. Sur le terrain, les professionnels de santé remarquent une modification des comportements : l’insouciance des années 1990 a fait place à une réelle prise de conscience.

Jean-Michel Delile travaille ainsi depuis vingt-cinq ans au CEID, le Comité d’Etude et d’Information sur la Drogue et les addictions. A Bordeaux, il tient également l’une des antennes Consultation Cannabis, mise en place par le gouvernement lors du plan national de lutte contre les drogues et toxicomanies. « La fréquentation est en hausse constante depuis quelques années. Beaucoup viennent de manière spontanée ; ce ne sont pas forcément des personnes dépendantes, mais de simples usagers qui s‘inquiètent ».

Ecouter le Dr Jean-Michel Delile, psychiatre et addictologue. « Avant, on ne voyait jamais un usager nous parler de problèmes de cannabis – c’était toujours les parents qui venaient. »

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