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Référendum sur l'avortement : l'Irlande à l'heure du choix

Pour la première fois de leur histoire, les Irlandais sont appelés à se prononcer ce vendredi par référendum sur la libéralisation de l'avortement. A quelques heures du résultat, le débat continue de faire rage dans ce pays toujours très catholique. 

Référendum sur l'avortement : l'Irlande à l'heure du choix Sebastian Kaczorowski /iStock




Une journée historique. Pour la première fois, les Irlandais sont appelés à se prononcer par référendum sur l’avortement ce vendredi 25 mai. S’ils votent "oui" pour sa libéralisation, ils abrogueront alors une loi clé de leur constitution : le 8amendement, qui interdit l’IVG depuis 1893 dans ce pays catholique pratiquant. La loi avait déjà été assouplie en 2013, autorisant aujourd’hui une femme à avorter mais seulement au cas où sa santé serait menacée. L’inceste, le viol ou d’éventuelles malformations du fœtus ne sont donc toujours pas reconnus là-bas comme des motifs légaux pour interrompre la grossesse. A quelques heures des résultats, le débat continue de faire rage dans le pays mais également à l’étranger, l’Irlande cristallisant aujourd’hui toutes les dissensions autour de cet épineux sujet.   

Sur les réseaux sociaux, on peut voir la mobilisation des Irlandais expatriés qui se préparent à rentrer dans leur pays d’origine, principalement pour voter en faveur de la légalisation de l’IVG, et le font savoir avec le hashtag "home to vote" ("A la maison pour voter"). Une Irlandaise a même été jusqu’à interrompre sa lune de miel pour rentrer voter. "Je suis prête pour l'Irlande que je mérite, que vous méritez, que tous ceux qui dû vivre la même chose que moi dans la solitude méritent", a-t-elle écrit sur Twitter. 

Les célébrités irlandaises se mobilisent pour le "Yes"

De nombreuses célébrités irlandaises se sont également positionnées en faveur de la libéralisation de l’avortement dans une vidéo en noir et blanc largement relayée sur Internet. "Aujourd’hui en Irlande", commence Liam Cunningham connu pour son rôle de Davos Seaworth dans Game of Thrones en préambule du court-métrage. "En Irlande aujourd’hui", poursuivent d’autres personnalités avant d’expliquer la situation une par une. "Si la femme assise à côté de vous est enceinte", déclare le réalisateur Peter McDonald, "elle n'a aucun droit sur son propre corps", conclut l’atroce Owen McDonnell. "Pourquoi quelqu'un d'autre que moi peut choisir ce que je fais de mon propre corps ?", questionne le comédien Cillian Murphy (Peaky Blinders), avant qu'une autre star rappelle que l’avortement est aujourd’hui passible en Irlande de 14 ans de prison. Et Saoirse Renan (Lady Bird) de conclure : "S’il vous plaît, votez "oui"".

Un "oui" pas encore assuré. Car, si à quelques jours des élections, il semblait en bonne voie pour l’emporter selon la majorité des sondages, de nombreux Irlandais continuent de se mobiliser pour l’empêcher. Dans le pays environ 3.000 personnes militent activement pour le "non". Depuis l’annonce du référendum il y a deux ans, ces "pro vie" mènent une guère de la communication chevronnée pour décrédibiliser les "pro choix", rappelant constamment que c’est au Royaume-Uni, ancien colonisateur, que les Irlandaises vont avorter. Le groupe anti-avortement Love Both ("Aimez les deux", soit la mère et l’enfant à naître), fait du porte-à-porte pour diffuser sa "propagande", tandis que d’autres militants se contentent de coller des affiches de fœtus et d’échographie partout dans les rues.  

Cette mobilisation des laïcs est bien évidemment soutenue par l’Église catholique qui, consciente de son impopularité en Irlande depuis les révélations sur les scandales d’abus sexuels commis par des prêtres, se fait relativement discrète. "Il est faux de proclamer qu’un large accès à l’avortement va faire de l’Irlande un pays moderne en plaçant les femmes au centre, a toutefois dénoncé Mgr Eamon Martin, archevêque d’Armagh et primat de toute l’Irlande, dans son message du Nouvel An. L’Irlande a une occasion unique de témoigner fortement que nous prenons soin du plus faible et du plus petit, comme du plus fort et du plus sain, du plus jeune comme du plus âgé…".

Car si les évêques refusent aujourd’hui de monter en première ligne, c’est à l’Église catholique que l’Irlande doit cette loi interdisant l’avortement, même en cas de viol ou d’inceste. En 1983, son influence étant telle qu’elle avait réussit à faire voter à 66,9% l’amendement affirmant que "l’État reconnaît le droit de l’enfant à naître et, avec le même égard, le droit à la vie de la mère".  

En Italie, 70% des médecins opposent une clause de conscience 

Mais si l’Irlande attire aujourd'hui tous les regards, c'est parce qu'elle n’est pas la seule interdisant l’avortement. En Amérique latine, seuls trois pays (Cuba, Guyana et l'Uruguay) l'autorisent sans condition. En Europe, il est toujours illégal à Malte et en Pologne. "L’Irlande est un symbole important dans la mesure où il y a aujourd’hui un verrou sur cette question de l’avortement", expliquait jeudi 24 Véronique Séhier, co-présidente du Planning familial, au micro de BFMTV alors qu’elle manifestait avec d’autres militants pro-IVG devant l’ambassade d’Irlande à Paris pour défendre le "oui".

Et cette dernière de rappeler que si l’IVG est aujourd’hui autorisée dans la plupart des pays européens, elle fait l’objet de nombreuses restrictions. "En Hongrie, aujourd’hui, ce n’est pas interdit, mais le pays a inscrit en 2011 dans sa constitution le droit à la vie dès la conception", explique-t-elle. "L’Italie a une loi qui est à peu près comme celle de la France. Mais 70% des médecins opposent une clause de conscience, qui existe aussi en France. Ça veut dire que les femmes en Italie, même en ayant une loi qui leur garantit normalement l’accès à l’avortement, sont empêchées d’avorter parce qu’un mouvement anti-avortement proche du Vatican incite les médecins à opposer la clause de conscience", dénonce-t-elle également.

Une issue incertaine 

En France, la loi de Simone Veil du 17 janvier 1975 a dépénalisé l’avortement. Aujourd'hui, le Code de la santé publique permet à toute femme enceinte, majeure ou mineure, de demander à un médecin une IVG, jusqu’à la fin de la 12e semaine de grossesse. Mais même dans l’Hexagone, ce droit ne fait pas l’unanimité et le débat existe toujours. En 2014, quand l’Assemblée avait supprimé le terme "détresse" de la loi Veil, Marion Maréchal-Le Pen avait dénoncé des "IVG de confort" et Jean-Christophe Fromantin, qui était alors député-maire UDI de Neuilly-sur-Seine, avait mis en garde contre un "risque d'eugénisme". 

Le résultat du référendum irlandais devrait être annoncé samedi 25 dans la soirée, après le décompte des voix. Si le "Yes" l’emporte, l’amendement de la Constitution sera remplacé par le texte suivant : "La loi peut prévoir des dispositions pour la réglementation des interruptions de grossesses". Les termes exacts d’un projet de loi légalisant l’avortement restent donc très flous et la partie encore loin d’être gagnée…

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