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Antibiorésistance : l'environnement montré du doigt

Pour lutter contre la résistance aux antibiotiques, un rapport remis à Marisol Touraine insiste sur l'importance du lien entre environnement et antibiorésistance. 

Antibiorésistance : l'environnement montré du doigt David Goldman/AP/SIPA




La résistance bactérienne aux antibiotiques est un fléau qui menace la santé humaine dans le monde entier. Les causes sont multiples, mais depuis des années, les autorités sanitaires ciblent le mésusage de ces médicaments par les médecins et les patients.
Or, aujourd’hui, la lutte contre l’antibiorésistance s’essouffle. Et les chiffres le prouvent : chaque année, en France, près de 160 000 personnes sont infectées par une bactérie multirésistante et 12 500 en meurent.

Face à ce constat, un groupe d’experts piloté par le Dr Jean Carlet appelle à réfléchir en dehors des schémas classiques de dissémination de l’antibiorésistance. Le phénomène ne se cantonne pas à l’hôpital, aux cabinets médicaux ou à l’usage de ces médicaments dans les élevages, selon le rapport remis ce mercredi à la ministre de la Santé.

« On s’aperçoit de plus en plus qu’un autre secteur est impacté, celui de l’environnement, des eaux usées et des sols qui transportent des antibiotiques et des bactéries multirésistantes », confie à Pourquoidocteur le Pr Antoine Andremont, chef du laboratoire de bactériologie à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (Paris) et responsable du groupe de travail « Antibiorésistance et environnement ».

Et le spécialiste de poursuivre : « Dans l’environnement, on trouve à la fois des bactéries humaines amenées par les matières fécales, des bactéries animales provenant du lisier et des quantités non négligeables d’antibiotiques qui sont peu ou mal éliminés par les stations d’épuration », reprend-t-il. Ainsi, l’environnement est-il devenu un bioréacteur où émergent de nouveaux mécanismes de résistance. Or, ces bactéries multirésistantes peuvent être transmises aux animaux lorsqu’ils broutent de l’herbe contaminée ou boivent dans des points d’eau souillés. Fatalement, les humains sont concernés.

Diminuer l'antibiothérapie dans les élevages

Aujourd’hui, l’antibiorésistance est sortie du domaine médical. Elle concerne l’ensemble de la société. Et l’utilisation des antibiotiques à titre préventif dans les élevages le montre bien.

« La consommation d’antibiotiques destinés aux animaux pose la question sur le type d’agriculture et d’élevage qu’on produit et le type d’alimentation que l’on souhaite, relève le Pr Antoine Andremont. Si on donne des antibiotiques aux animaux, c’est pour produire plus de viande, car la demande en produits carnés est plus importante. Mais si on en mange autant, c’est qu’on est incité par les producteurs qui veulent en produire toujours plus. »

Aussi, tenter de limiter l’utilisation d’antibiotiques en élevage intensif remet en cause une certaine pratique de l’agriculture que l’on connaît aujourd’hui. « Mais on se heurte à des lobbies financiers puissants qui n’y sont pas favorables », souligne l’expert.


Vers un comité interministériel

Le rapport remis à Marisol Touraine insiste sur la nécessité de mener des recherches permettant de comprendre pourquoi l’antibiorésistance prend de l’ampleur et par quels mécanismes.

Car ceux-ci sont complexes et multiples. Les experts évoquent le rejet dans l’environnement de divers produits chimiques, comme les métaux lourds, qui augmentent la pression de sélection des bactéries multirésistantes. Ils pointent également du doigt « l’utilisation immodérée des biocides, tant à des fins industrielles que domestiques ».
Derrière ce terme générique se cachent les détergents utilisés dans les entreprises, les désinfectants pour les mains ou pour faire le ménage. « Tous ces produits de vaisselle, de lessive étiquetés "anti-bactérien" peuvent favoriser la résistance bactérienne. C’est ce qu’on appelle un effet croisé : vous provoquez une résistance aux biocides et aux antibiotiques », explique le Pr Antoine Andremont.

Mais pour y arriver, les différentes structures – recherches, industrie, agroalimentaire – devront travailler ensemble. Pour cela, les experts ont proposé la mise en place d’un comité interministériel qui devrait impliquer les différents ministères en charge de ces secteurs. Mais une action isolée de la France ne suffira pas, une mobilisation internationale est nécessaire. Lors du prochain G7 santé à Berlin, les 8 et 9 octobre, la ministre de la santé demandera aux pays étrangers de coordonner leurs initiatives.  

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