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Enquête

La migraine, une maladie toujours stigmatisée

Par Stanislas Deve

Une enquête, menée auprès de 4.000 Européens, révèle l’impact de la stigmatisation de la migraine sur la vie quotidienne des malades souffrant de crises de céphalées.

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La migraine se caractérise par des crises répétées se manifestant essentiellement par de pénibles maux de tête (céphalées). Cette maladie neurologique touche 15 % de la population mondiale, dont 7 à 10 millions de personnes en France.
Les trois quarts (74 %) des personnes touchées par la migraine considèrent que les soignants "ne prennent pas leur maladie au sérieux".
Les chercheurs plaident pour une "réévaluation du langage" qui entoure le diagnostic de la maladie. Et pour cause, 65 % des personnes atteintes de céphalées se sentent stigmatisées par des termes comme "invalidant", "chronique" ou encore "réfractaire".

"Plus stigmatisante que la démence, la maladie de Parkinson et l'accident vasculaire cérébral." Les personnes souffrant de migraine, une maladie neurologique qui affecte entre sept et dix millions de personnes en France selon l'Inserm, se sentent discriminées dans tous les aspects de leur vie quotidienne.

C’est la conclusion d’une vaste enquête de l'Alliance Européenne Contre la Migraine et les Céphalées (EMHA) et de l’Association Française Contre L'Algie Vasculaire de la Face, réalisée en 2023 dans 17 pays européens auprès de plus de 4.000 répondants – "migraineux" ou non.

Maux de tête : pour 74 % des patients, les médecins ne prennent pas leur maladie au sérieux

La stigmatisation de la migraine, qui se manifeste par des attitudes négatives, dédaigneuses ou intolérantes de la part des autres à l’égard des malades, "résulte souvent d’un manque de compréhension", selon l’étude. Pas moins de 26 % des participants non migraineux estiment ainsi que cette pathologie "n’est rien d’autre qu’un fort mal de tête". Les migraineux eux-mêmes (93 %) pensent que la société tout entière ne comprend pas bien la maladie.

Ce sentiment de stigmatisation se traduit jusque dans les cabinets de médecins : alors que les trois-quarts (74 %) des personnes touchées par la migraine considèrent que les soignants "ne prennent pas leur maladie au sérieux", elles sont 35 % à retarder ou éviter de consulter un médecin "par gêne et par crainte d’être jugées". "Les données de cette étude sont un signal d'alarme pour les cliniciens, car elles mettent en évidence une dimension importante du fardeau que représente la migraine pour nos patients", note Peter Goadsby, professeur de neurologie au King's College de Londres, qui a participé aux travaux.

La migraine peut aussi être un poids sur le lieu de travail : pour 62 % des répondants migraineux, elle "a influencé la manière dont leur employeur les évalue". A tel point que près d’un malade sur deux (43 %) a fait le choix de ne pas informer son employeur de sa condition, et ce, alors même que les crises peuvent affecter ses aptitudes professionnelles.

Migraine : il faut redéfinir le langage autour du diagnostic

D’après l’EMHA, la lutte contre cette stigmatisation, qui est source "de colère, de solitude et de tristesse" pour les concernés, doit passer par une "communication plus efficace sur l’impact" de la migraine, afin de faciliter la compréhension des familles, des collègues, des soignants... C’est pourquoi les chercheurs plaident pour une "réévaluation du langage" qui entoure le diagnostic de la maladie. Et pour cause, 65 % des personnes atteintes de céphalées se sentent stigmatisées par des termes tels que "invalidant", "épisodique", "chronique" ou encore "réfractaire". Dans cette optique, l’EMHA prévoit d’introduire cette année "un nouveau système de catégorisation pour exprimer efficacement la gravité de la migraine".