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Une législation contraignante

Don du sang : pourquoi les homosexuels doivent attendre un an

Par Caroline Delavault

A partir du 1er juillet, les homosexuels pourront donner de leur sang. Une mesure saluée mais qui reste contraignante.  

Epictura/Weerapat

Ils veulent sauver des vies mais doivent attendre un an. A Orlando, la communauté gay manifeste sa colère car ses membres ne peuvent pas, comme les autres citoyens américains, donner leur sang aux personnes victimes du carnage du week-end dernier.  

En matière de don du sang, la France obéit aux mêmes règles que celles en vigueur outre-Atlantique. A partir du 1er juillet prochain, les homosexuels pourront donner leur sang. Une mesure, qui met « fin à un tabou et à une discrimination » envers la communauté homosexuelle, faisait observer en 2015 le gouvernement.
Néanmoins, la législation reste contraignante. Les homosexuels ne peuvent faire don de leur sang uniquement s'ils s’abstiennent de toute relation sexuelle avec un autre homme pendant un an. Une restriction dénoncée par de nombreuses associations, à l’instar d’Homodonneur, qui qualifiait l’année d’abstinence requise comme une « insulte à la réalité ». Le gouvernement lui, tient à justifier cette mesure, prônant la sécurité des donneurs et les risques liés au VIH. 

 

 

Une population 200 fois plus à risque

Selon les chiffres de l’Institut de veille sanitaire, le risque d’exposition au virus du Sida est « 200 fois plus élevé » lors d’une relation sexuelle entre deux hommes. Ce risque serait nettement moins élevé lors d’une relation sexuelle hétérosexuelle ou entre deux femmes. Chaque année en France, le nombre d’homosexuels (HSH) infectés par le VIH est de 9 %, rapporte dans un article le site vih.org - un taux moins élevé que dans la population générale (17 personnes pour 100 000).

De plus, selon l'enquête Prévagay1, le nombre de personnes HSH vivant avec le VIH est de 18 %. Des données qui ont  préoccupé les autorités, longtemps réticentes à l'idée d'ouvrir le don de sang aux homosexuels. La peur
 d'endosser la responsabilité d'une  d contamination massive par transfusion sanguine. La pression de la  communauté gay, l'évolution de la législation dans d'autres pays ont fait évoluer les mentalités.

Dans une tribune signée dans le Huffington Post le 6 novembre 2015 , la ministère de la Santé et des Affaires sociales, Marisol Touraine, justifiait l’abstinence d’un an en soulignant que ce délai était celui dont ils « étaient certains, d’après les éléments scientifiques dont ils disposaient, qu’ils représentaient un niveau de risque identique entre homosexuels et hétérosexuels ». 

 

Priorité donnée à la sécurité des receveurs 

Un risque qui pour certains, peut être anticipé autrement. « Il est toujours très facile de tester les lots de sang une seconde fois, ce qui serait beaucoup plus simple que de multiplier les obstacles insultants pour ceux qui veulent sincèrement donner leur sang », confiait Didier Lestrade, journaliste et écrivain français dans une interview accordée au magazine Slate

Néanmoins, comme le souligne vih.org, même si les poches de sang sont testées par sérologie, les tests ne peuvent pas détecter le virus du Sida si ce dernier est présent dans l’organisme depuis peu (quatorze jours d’incubation). Cela présente donc un risque de plus pour les receveurs. 


« À celles et ceux qui s’étonneront de la mesure retenue et des difficultés pratiques de sa mise en œuvre (une «abstinence sexuelle» de douze mois, y compris en ayant recours au préservatif), les autorités sanitaires font valoir que le don de sang n’est pas un droit mais une forme d’exercice de solidarité biologique qui impose des règles et des devoirs vis-à-vis des receveurs.

Elles rappellent également que le modèle actuel n’est pas sans failles (entre 2011 et 2014, on a identifié et exclu vingt-quatre dons séropositifs au VIH) mais qu’il a néanmoins permis d’obtenir une réduction quasi-totale du risque de contamination post-transfusionnelle par le virus du sida », détaillait longuement à Slate Jean-Yves Nau, médecin journaliste. Le Comité national d'éthique considéraient lui que « le droit des receveurs à la protection de la santé et l’obligation en résultant de réduire le risque de transmission de maladies infectieuses » était essentiel.