ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Quand les détenus de la RDA donnaient leur sang pour l'Ouest

Quand les détenus de la RDA donnaient leur sang pour l'Ouest

Par Philippe Berrebi

MOTS-CLÉS :

Comment faire de l’argent sur le dos des détenus ? Dans les années 80, explique Nathalie Versieux dans les colonnes de Libération, des milliers de prisonniers ont subi des essais cliniques pour des laboratoires de l’Ouest. Mais ce n’est pas tout. Ce lundi, l’historien Tobias Wunschik présente un rapport qui détaille la filière du sang humain entre l’Est et l’Ouest.
Commandé par l’organisme chargé d’éplucher les archives de la Stasi, ce document revient sur ce curieux commerce orchestré par le régime communiste.

« Face au développement tardif du sida en RDA, les besoins en devises augmentent considérablement au début des années 80 pour acheter vaccins et premiers traitements », indique la journaliste. Alors, les autorités décident d’exporter du plasma sanguin. La population est réticente, qu’à cela ne tienne, le sang sera prélevé dans trois prisons sur des détenus politiques ou de droit commun. Un ancien responsable confirme : « Nous nous rendions à intervalles irréguliers dans la prison. Pour nous, cela valait le coup d’y aller, car à chaque fois, nous avions 60 à 70 donateurs. Je ne me souviens pas que nous ayons une seule fois prélevé le sang des employés ».
Chantage, pression du régime totalitaire, il était difficile pour les prisonniers de se soustraire à cette demande. « Une fois au moins, les infirmières chargées de prélever le sang des prisonniers ont refusé d’accomplir leur tâche », relate le quotidien.

Plus tard, le sang était revendu via un intermédiaire suisse à une section allemande de la Croix Rouge.
Ce n’est qu’en 1986 que ce triste commerce a cessé, non pas parce que les responsables ont eu des remords, mais parce que la qualité des produits livrés était insuffisante.
Près de trente ans plus tard, souligne le journal, les anciens détenus est-allemands attendent toujours une indemnisation et la Croix-Rouge a reconnu les faits.