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Sur un australopithèque

Cancer : découverte de tumeurs vieilles de 2 millions d’années

Par Audrey Vaugrente

Le cancer n’est pas une pathologie moderne : les plus anciennes traces remontent à 1,7 et 2 millions d’années. Cette découverte remet en cause une thèse dominante en médecine.

Vertèbre d’un Australopithèque atteinte de néoplasme bénin (Paul Tafforeau, ESRF)

Le cancer, une maladie de l’homme moderne ? C’est ce que supposaient, jusqu’ici, scientifiques et paléontologues. Les faits étaient là pour soutenir leur affirmation : la plus ancienne trace de tumeurs a été retrouvée sur un homme de Néandertal vieux de 120 000 ans. Aucun autre élément, jusqu’au 28 juillet. C’est à cette date qu’une équipe sud-africaine a publié, dans le South African Journal of Science, deux études qui remettent en question cette thèse. Ils y relatent la découverte de deux squelettes porteurs de cancer. Leur âge se chiffre en millions.

Un pied millénaire

Cette révélation est majeure, puisqu’elle bouleverse totalement l’évolution des maladies chez l’homme. Les deux restes, exhumés en Afrique du Sud, font reculer de plusieurs millénaires l’apparition du cancer. Le premier fossile provient du site de Swartkrans, à une trentaine de kilomètres de Johannesbourg. Un ossement a particulièrement attiré l’attention des archéologues : un os du pied qui présente, sans doute possible, les séquelles d’une tumeur maligne. Il appartenait à un hominidé qui vivait il y a 1,7 million d’années.

Source : Patrick Randolph-Quinney (UCLAN)


L’espèce du porteur de ce cancer est difficile à identifier. « A cause de sa préservation, nous ne savons pas si cet os de pied cancéreux appartient à un adulte ou un enfant, ni si le cancer a provoqué la mort de cet individu », souligne le Dr Bernhard Zipfel. C’est dire l’ampleur de la tâche. Mais plusieurs éléments ne laissent aucun mystère : l’hominidé a souffert de cet ostéosarcome, une forme agressive de cancer qui touche principalement les jeunes. « Nous pouvons affirmer que cela a affecté sa capacité à marcher ou courir », précise le Dr Zipfel.

Un Australopithèque atteint

Le deuxième article remonte encore plus loin dans le passé de l’humanité. Il s’intéresse, plus précisément, à un ancêtre que chacun connaît : l’australopithèque. Ce sont les restes de Karabo, un Australopithecus sediba de 2 millions d’années bien connu des paléontologues, qui fait l’objet des recherches. Une de ses vertèbres porte les traces d’un néoplasme bénin. Deux choses rendent cette découverte fascinante aux yeux du Dr Patrick Randolph-Quinney, co-auteur de deux publications : « Non seulement elle se trouve sur son dos, une localisation très rare chez l’homme moderne, mais en plus elle se trouve chez un enfant », s’enthousiasme-t-il.

L’emballement est permis : c’est la première fois qu’un fossile d’individu jeune présente des traces de tumeur. La preuve la plus ancienne de tumeur chez un hominidé provenait d’un Néandertalien de 120 000 ans. Un petit jeune à côté de ces ancêtres multi-millénaires.

Le paléo-diet inefficace ?

Voilà qui rebat les cartes de l’évolution de la santé des hommes. « La médecine moderne a tendance à supposer que les cancers et les tumeurs humaines sont des maladies causées par le mode de vie moderne et l’environnement », résume Edward Odes, qui signe l’étude. Une vision erronée : des millions d’années avant l’industrie, cette maladie existait déjà.

Les adeptes du régime paléolithique risquent également d’être déçus. Leurs chantres mettent en avant les bénéfices du retour à une alimentation millénaire. Le paleo diet aurait même la réputation de lutter contre certains cancers grâce à un mode de vie similaire à celui de nos ancêtres. S’il permet sans doute une perte de poids, ces derniers travaux renforcent les doutes sur de quelconques bénéfices sanitaires.

Regardez l'Invité Santé de l'Eté consacré à la santé de nos ancêtres :

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