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Douleur de l’épaule

Douleur de l’épaule : pas toujours une tendinite

La douleur de l’épaule est fréquente, en particulier après 50 ans, et correspond le plus souvent à une atteinte des tendons des muscles de l’épaule (la « coiffe des rotateurs ») en rapport avec un conflit avec l’acromion, l’os de la partie supérieure de l’épaule : c’est le « conflit sous-acromial ». De nombreuses autres maladies rendent cependant le diagnostic parfois délicat.

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A quoi sont dues les douleurs traumatiques de l’épaule ?

Il existe 2 sortes de traumatismes : les traumatismes aigus et les traumatismes chroniques (« microtraumatismes »).

Dans les mêmes circonstances, en cas de choc violent, et en cas de chute chez le cycliste, le motard et le cavalier peut se produire une fracture de la clavicule. Il existe une douleur antérieure aiguë de l’épaule, avec une impotence fonctionnelle, la personne se relevant en soutenant son bras malade. On aperçoit une saillie sous la peau en regard de la fracture de la clavicule avec un point douloureux (« exquis ») en regard du foyer de fracture. La radiographie confirme le diagnostic et le choix du traitement dépend de l’importance du déplacement mais est le plus souvent « orthopédique », c’est-à-dire qu’il s’agit d’une immobilisation avec un bandage « en huit », maintenant les épaules en arrière. Dans les cas où le déplacement est trop important, le chirurgien préfèrera fixer la fracture avec une « ostéosynthèse par plaque vissée », ceci afin d’éviter les 2 principales complications de cette fracture : la « pseudarthrose », qui est une non-consolidation de la fracture, et le « cal vicieux », qui est une consolidation en mauvaise position de la fracture de la clavicule.

En cas de douleur aiguë de l’épaule au cours d’un effort de soulèvement dans un contexte de douleurs chroniques de l’épaule, témoignant d’un syndrome de conflit, il faut évoquer la survenue d’une rupture aiguë de la coiffe des rotateurs. Elle peut survenir de façon traumatique chez une personne de la cinquantaine qui tombe et cherche à se rattraper : certains muscles de la coiffe, qui sont déjà lésés, vont se rompre au cours d’un effort un peu plus important que d’habitude.

Lors d’une chute (judo) ou d’un choc direct (rugby) sur le moignon de l’épaule, il est possible d’observer une luxation de l’articulation entre la clavicule et l’omoplate (« luxation acromio-claviculaire »), par déchirure de la capsule articulaire et des ligaments. Des radiographies seront demandées et en fonction du stade de gravité de la luxation, le traitement sera basé sur une contention et de la rééducation ou une intervention chirurgicale avec laçage, ligamentoplastie et rééducation.

Parfois, l’évolution post-traumatique de la luxation acromio-claviculaire n’est pas favorable et peut se développer une « ostéolyse post-traumatique » qui consiste en l’apparition à distance du traumatisme, et alors que la personne allait mieux, d’une douleur permanente (jour et nuit) de l’articulation acromio-claviculaire avec déminéralisation puis disparition radiologique (« résorption ») du quart externe de la clavicule. Après cette phase de destruction, qui dure plusieurs mois, succède une phase de réparation de la clavicule mais qui reste incomplète. A noter que l’acromion n’est jamais touché. Le traitement est purement symptomatique (AINS et repos).

Il est également possible d’observer des luxations de l’épaule qui peuvent être de 2 types : la luxation antéro-interne (« sous-coracoïdienne »), la plus fréquente chez le sportif (judo, ski…) : après une chute sur le coude, survient une douleur de l’épaule et une sensation de déboitement. A l’examen, le bras est bloqué en position écartée et rotation externe, avec un vide externe sous l’acromion (« signe de l’épaulette ») et comblement du sillon entre le muscle pectoral et le muscle deltoïde (par la tête de l’humérus en mauvaise position). Il faut immobiliser le malade avec une écharpe et l’adresser à l’hôpital pour bilan et vérification de l’absence de lésions des nerfs (plexus brachial et nerf circonflexe) et de fractures associées (en particulier du rebord antérieur de la cavité articulaire de l’omoplate, la glène). Le traitement consiste en réduction de la luxation par diverses techniques et immobilisation pour 2 semaines. Il existe de très rares cas de lésions postérieures de l’épaule avec un élargissement de l’épaule de profil et blocage de l’épaule en rotation interne.

A noter que lors d’une chute très violente (cavalier et hockey sur glace), une « luxation sterno-claviculaire » peut se produire avec impotence fonctionnelle du bras, mais la douleur siège à l’extrémité interne de la clavicule avec une tuméfaction en cas de luxation antérieure et une dépression en cas de luxation postérieure.

Pour être lésé de façon chronique, le « bourrelet glénoïdien » (l’équivalent du ménisque à l’épaule) doit être soumis à un geste sportif très contraignant pour l’épaule, tel que « l’armé du bras » au cours du javelot ou du hand-ball, suivi d’un « lancer » brutal et puissant, ce qui, lorsqu’il est répété, aboutit à une dégénérescence accélérée de ce stabilisateur de l’épaule : le bourrelet glénoïdien peut se décoller de ses insertions, s’effilocher, voire se fissurer. 

La personne souffrant de cette épaule douloureuse et instable se plaint de douleurs brutales lors de « l’armé du bras », avec sensation d’instabilité et de pseudoblocages. Ces symptômes évoluent par crise et la douleur réapparaît lors du geste de lancer, mais il n’y a pas de douleurs en dehors de ce geste technique, du moins dans un premier temps. L’examen clinique reproduit la douleur lors de l’armer du bras et peut trouver une instabilité de la tête de l’épaule. La radiographie et l’arthroscanner font le diagnostic en objectivant les lésions osseuses de la glène (et parfois de la tête humérale) et en observant les lésions du bourreler glénoïdien (désinsertion…). Le traitement est d’abord médical avec des AINS et de la rééducation et, en cas d’échec, il est chirurgical afin de stabiliser mécaniquement l’épaule (butée osseuse).

A quoi sont dues les douleurs non-traumatiques de l’épaule ?

Les douleurs non-traumatiques de l’épaule sont assez fréquentes, au fur et à mesure du vieillissement, et de la répétition des conflits qui peuvent se produire entre la coiffe musculaire et l’épaulette osseuse de l’épaule, « l’acromion », dans certains gestes de l’épaule.

Cette souffrance dégénérative des tendons de la coiffe musculaire est responsable de 5 grandes catégories de douleurs de l’épaule qui prédominent généralement dans la journée et lors des mouvements.

Elle correspond à une douleur de l'épaule qui est électivement déclenchée par des gestes particuliers du bras : en élévation externe du bras (« abduction »), comme attraper quelque chose dans un placard en hauteur, se coiffer, enfiler une veste... L'examen clinique déclenche la douleur liée au conflit sous-acromial en reproduisant ce conflit par la mobilisation active (« accrochage douloureux » en levant le bras) ou passive de l'épaule (test de Neer et Hawkins qui consistent à élever passivement le bras du malade pour reproduire le conflit). L’examen cherche également à reproduire la douleur par la mobilisation contrariée sollicitant le tendon atteint (sus-épineux ou sous-épineux essentiellement lors des conflits externes, tendon du long biceps lors du conflit antérieur). L'échographie permet de voir l’étendue des lésions, de voir si elles sont associées à une perforation de la coiffe et de voir s’il y a une bursite associée ou un épanchement de liquide dans la gaine du tendon du long biceps en avant. 

Les « calcifications » (qui n’en sont pas) sont des dépôts de microcristaux d’hydroxyapatite, normalement contenus (et isolés du reste de l’organisme) dans une petite enveloppe au contact des tendons. Ces « calcifications » sont visibles sous forme d’opacités bien limitées au contact des tendons, de façon isolée ou au niveau de plusieurs articulations dans le cadre d’une « maladie des calcifications tendineuses multiples ». 

Ces dépôts de microcristaux peuvent être longtemps silencieux (« asymptomatiques ») ou à l'origine de douleurs chroniques dans le cadre d’une épaule douloureuse simple quand elles siègent dans l’espace acromio-claviculaire (qu’elle va alors rétrécir), mais elles peuvent s'exprimer de façon extrêmement brutale par une douleur très intense, empêchant tout mouvement, voire insomniante.
L'examen clinique est quasiment impossible à cause de la douleur, toute mobilisation active ou passive de l'épaule est, en effet, très douloureuse. Une fièvre modérée (inférieure à 38 °C) est possible, de même qu’il existe souvent un syndrome inflammatoire biologique avec une élévation des polynucléaires neutrophiles. L'examen radiographique des épaules permet généralement de voir la calcification sur une ou plusieurs incidences radiologiques différentes (rotation neutre, latérale et médiale et profil de coiffe). Mais si la poche de la calcification est en train de s’ouvrir, et que les microcristaux sont en train de se répandre, il est possible de ne pas la voir, ou de n’apercevoir que quelques traces très discrètes sur la radiographie : la « calcification » devient souvent hétérogène, mal limitée et elle peut migrer plus ou moins complètement dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne et disparaître. Les calcifications sous-acromiales étant souvent bilatérales, une « calcification peut être vue sur l’autre épaule ce qui donne une indication. 

Les radiographies ne montrent que des signes indirects de rupture de coiffe : diminution de la hauteur acromio-humérale avec ascension de la tête humérale, voire condensation et ostéophytose à la partie inférieure de l'acromion, puis développement d'une arthrose scapulohumérale excentrée. C’est l’échographie simple, performante et peu coûteuse, qui est l’examen de choix pour faire le diagnostic de rupture et mesurer l’étendue de la rupture de la coiffe. Mais la rupture est également visible sur un arthroscanner ou une IRM.

La douleur est en regard de l’articulation, qui est parfois tuméfiée. Des irradiations de la douleur peuvent se faire vers le haut dans le cou et le bras, mais elles sont électivement déclenchées par les mouvements du bras, et pas du cou, et surtout par la mise en compression de l’articulation acromio-claviculaire, la nuit en position latérale sur le côté atteint, mais aussi en mettant la main du bras atteint sur l’épaule opposée et en essayant de bouger le coude vers le haut et le bas.

Les radiographies standards confirmeront l’altération de l’articulation acromio-claviculaire avec pincement de l’interligne articulaire et condensation, voire érodions de ses berges et ostéophytes. L’échographie peut montrer un épanchement intra-articulaire, de même que l’IRM (le plus souvent inutile) permettra de montrer l’inflammation osseuse avec plus de précision et d’éliminer d’autres maladies associées tendineuses ou osseuses.

Un traitement antalgique et anti-inflammatoire, associé à la mise au repos du bras, pendant 2 semaines, suffira le plus souvent, mais une infiltration intra-articulaire peut-être plus efficace. Une rééducation consolidera le résultat.

Qu’est-ce qui favorise les douleurs mécaniques de l’épaule ?

La très grande mobilité de cette articulation a comme corollaire son instabilité anatomique. L’épaule est surtout stabilisée activement par les muscles de la « coiffe des rotateurs » ce qui débouche sur des conflits et des douleurs en cas de désordre et perte de la coordination musculaire. 

Chez certaines personnes, l’espace sous l’os de l’épaulette de l’épaule (l'acromion), ou « espace sous-acromial », peut être plus étroit, ou l’extrémité de l’acromion être anormalement pointue (on parle de « bec acromial »), soit naturellement, soit à cause d’un « ostéophyte ». Il apparaît alors un « conflit sous-acromial » : la répétition de ce conflit, en particulier lors des mouvements d’élévation du bras, favorise la survenue de lésions de certains tendons de l'épaule (épaule douloureuse) et, si rien n’est fait, leur rupture (épaule pseudo-paralytique).

Le vieillissement est très probablement un facteur de fragilité en raison d’une dégénérescence des tendons de la coiffe des rotateurs. En effet, les ruptures de coiffe sont beaucoup moins fréquentes avant 40 ans (sauf dans le cas d’un métier à risque) et, a contrario, des lésions de tendinopathie ou de rupture partielle de la coiffe sont fréquentes à l’IRM chez les personnes de plus de 40 ans, même en l'absence de douleurs de l'épaule.

Certaines activités et certains métiers favorisent les lésions des tendons de l'épaule car l'articulation y est particulièrement sollicitée : le travail avec des contraintes de postures (travail réalisé les bras en l'air, au-dessus de l'épaule) ou de répétition (travail nécessitant une élévation répétée du bras). 

Des lésions tendineuses peuvent apparaître, même lors de mouvements répétés de l'épaule avec la main en dessous du niveau de l’épaule, lorsque l'activité professionnelle nécessite des efforts musculaires importants de l'épaule (port de lourdes charges). 

Bien sûr, toutes les activités sportives qui requièrent des gestes d'armer et de lancer du bras (handball, volley-ball, javelot, tennis...), ainsi que les activités à risque traumatique (rugby, football, judo...), sont également responsables de lésions en raison des microtraumatismes liés à l'hyper-utilisation en position à risque de l'articulation.