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Aide à la procréation

FIV : la banalisation inquiète les experts

En cas de troubles inexpliqués de la fertilité, les couples ont tendance à recourir à la fécondation in vitro alors que 60% auraient fini par concevoir naturellement dans les 2 ans.

FIV : la banalisation inquiète les experts    OJO Images / Rex Featur/REX/SIPA




Sommes nous en train d’abuser de la FIV ? La question est clairement posée en titre d’un article publié dans le British Medical Journal. Des spécialistes britannique, hollandais et australien de l’assistance médicale à la procréation s’inquiètent de voir cette technique devenir victime de son succès. « Un million de bébés sont nés au cours des 25 premières années de la FIV entre 1978 et 2003. Il n’a ensuite fallu que 2 ans de plus pour atteindre les 2 millions en 2005 et plus de 5 millions de bébés supplémentaires sont nés jusqu’à la fin de l’année 2013 », écrivent les auteurs qui soulignent que la part des naissances par fécondation in vitro, de l’ordre de 3% dans nos pays développés, dépasse maintenant 5% au Danemark ou en Belgique.

Se laisser le temps de la conception naturelle

En cas d’obstruction tubaire chez la femme ou d’infertilité masculine sévère, le recours aux techniques de fécondation in vitro n’est pas contesté. Ce qui interpelle ces spécialistes, c’est la tendance à se tourner très vite vers la FIV, sans même se laisser, pour les 30% de troubles de la fertilité non expliqués par une cause médicale, le temps de la conception naturelle, estimé entre 2 et 3 ans.

Or par rapport à une grossesse naturelle, la FIV n’est pas sans risques. Ni pour la mère, qui est plus exposée aux complications comme le diabète gestationnel ou la pré-éclampsie, ni pour l’enfant, dont les risques de prématurité, de petit poids de naissance et de certaines malformations congénitales sont accrus.

Les auteurs de l’article du BMJ soulignent que dans ces cas de stérilité inexpliquée, la grossesse survient naturellement dans les 2 ans pour 60% des couples. Autrement dit, il serait urgent d’attendre. « Mais quand ils nous consultent, quelque soit leur âge, les couples ont déjà attendu. Pas forcément 2 ans certes, mais le message « il n’y a rien d’anormal dans votre dossier, revenez me voir dans 2 ans » n’est pas recevable par les patients », justifie le Pr François Olivennes, gynécologue-obstétricien à Paris.

 

Un recours trop automatique à la FIV à partir de 38 ans

« Il y a sûrement un excès de fécondation in vitro, reconnaît le spécialiste français. En particulier pour les patientes de plus de 38 ans chez qui certains médecins ont tendance à penser automatiquement à la FIV. » Or ces patientes de plus de 38 ans sont nombreuses parmi les cas de stérilité inexpliquée qu’évoquent les auteurs. « Il s’agit de couples formés ou recomposés tardivement. Ce décalage de l’âge de la femme au moment de la grossesse est un des facteurs de l’augmentation du recours à la FIV », souligne François Olivennes. Car après 38 ans, le temps presse et le corps médical a tendance à se tourner d’emblée vers la technique d’aide médicale à la procréation la plus efficace, en l’occurrence la FIV.

 

Ecoutez le Pr François Olivennes, gynécologue-obstétricien à Paris : « La FIV est plus lourde mais le taux de succès est de 30% contre 10 à 15% pour une insémination. Est-ce qu’il vaut mieux tenter d’abord de faire simple ou faire directement compliqué mais efficace ? »


 

« La FIV est devenue une industrie génératrice de profits » 

Les considérations sont également économiques. « La FIV est devenue une industrie génératrice de profits », soulignent les auteurs de l’article du BMJ. « Certes une FIV est beaucoup plus coûteuse qu’une insémination mais selon certaines études, il reste économiquement plus favorable de faire une FIV plutôt qu’un cycle de 3 ou 4 stimulations puis insémination. C’est l’objet de nombreux débats dans les congrès », indique le Pr Olivennes.

 

Pour les auteurs du BMJ, il y a désormais urgence à établir des lignes directrices plus précises pour « un recours plus judicieux » à la fécondation in vitro. « Les pionniers de cette technique ont eu à se battre contre les dogmes scientifiques, sociétaux et religieux. Nous sommes maintenant face à un nouveau choix de société, concluent-ils. Nous pouvons continuer à offrir un accès rapide à la FIV, non validé par la science ou suivre le chemin plus difficile des indications pour lesquelles elle démontre efficacité et sécurité. »

 

Ecoutez le Pr François Olivennes : « Il faut trouver le juste milieu entre ne pas se précipiter chez des gens qui en ayant une activité sexuelle fournie pourront obtenir une grossesse naturellement et ceux à qui l’on peut proposer d’autres étapes avant la FIV. »

 

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