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QUESTION D'ACTU

Formation, évaluation

Les pionniers de l’oncogériatrie font des petits

Un tiers des nouveaux cas de cancers est diagnostiqué chez les plus de 70 ans. Pour mieux prendre en charge ces patients fragiles, le nombre d’unités pilote d’oncogériatrie devrait doubler d’ici deux ans.





A l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP), un patient de plus de 90 ans atteint d’un cancer n’est pas systématiquement condamné aux soins palliatifs. « Chez ces patients très âgés, nous pratiquons des chimiothérapies, des interventions curatrices de leur cancer, déclare le Pr Olivier Saint-Jean, chef du service de gériatrie de cet hôpital parisien. Ce serait totalement inimaginable dans d’autres pays. » Pour autant, les professionnels de l’HEGP ne sont pas des acharnés de la chimiothérapie. Simplement, « la France est à la pointe de l’oncogériatrie », affirme le Pr Saint-Jean. 

C’est pourquoi l’ARC, l’Association pour la recherche sur le cancer, vient de publier une brochure intitulée « Comprendre l’oncogériatrie ». But de l’opération : faire connaître au grand public cette nouvelle pratique, née de la rencontre entre la gériatrie et l’oncologie. Jusqu’à quel âge peut-on faire une chimiothérapie ? Quelles sont les pistes de recherche prometteuses pour les seniors atteints d’un cancer ? Toutes ces questions, abordées dans la brochure de l’ARC, méritent d’être posées quand on sait qu’un tiers des nouveaux cas de cancers diagnostiqués chaque année, survient chez les plus de 70 ans.

Pour être à la hauteur de l’enjeu, la communauté médicale a commencé à s’organiser au début des années 2000. Sans créer réellement une nouvelle discipline, oncologues et gériatres ont progressivement mis au point des prises en charge taillées sur mesure pour les personnes âgées atteintes d’un cancer. Un travail d’orfèvre qui devait permettre d’éviter deux types d’erreurs : « Soit on traite comme un adulte jeune et là, on a des complications majeures liées au fait que le traitement n’est pas adapté à la condition physiologique du malade âgé. Soit on se dit, à 80 ans, je ne vais pas l’embêter. Ce qui est une erreur dans la mesure où on peut tout à fait avoir recours à des thérapeutiques curatives. » En développant un plan de soins gériatriques en soutien du plan de soins oncologiques, ces professionnels constatent qu’ils améliorent le pronostic de leurs patients.


Questions au 
Pr Olivier Saint-Jean, chef du service de gériatrie à l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP).

 

Traiter aussi les plus de 90 ans

 Quel est le rôle des unités pilote de coordination en gériatrie ?
Pr Olivier Saint-Jean. Pour être labellisé « unité Pilote » et répondre à l’appel d’offres de l’Inca, nous devions déposer des projets dans trois axes : l’enseignement, l’information et la recherche. Et puis dans un deuxième temps, nous avons bénéficié de crédits pérennes qui nous ont permis de recruter des professionnels médicaux et para-médicaux. Il y a actuellement une quinzaine d’unités pilote de coordination en gériatrie (UPCOG), réparties sur l’ensemble du territoire. Cela permet d’abord de faire émerger une pratique, mais aussi d’avoir des lieux où on montre que l’on peut avoir d’excellents résultats dans la coordination avec les oncologues et dans la prise en charge de ces patients âgés.

 

Ces unités pilote ont-elles déjà fait la preuve de leur efficacité ?
Pr O. S.-J. 
Oui puisqu’en France, nous sommes vraiment en avance concernant notre capacité à traiter des cancers chez des malades très âgés. Dans mon service par exemple, il y a des patients de plus de 90 ans à qui nous faisons des chimiothérapies ainsi que des interventions chirurgicales curatrices de leur cancer. Ce sont des choses qui sont totalement inimaginables dans d’autres pays. Mais, attention, nous ne sommes pas des "jusqu’au-boutistes" de la chimiothérapie. Ces prises en charge que nous tricotons dans nos unités, nous voudrions maintenant que tous les patients puissent en bénéficier.
Entretien avec CC


 

Une évaluation gériatrique

Pour aller plus loin et favoriser la collaboration entre ces deux spécialités qui s’ignoraient, ces pionniers ont créé, en 2005, le Groupe d’échange de pratiques en oncogériatrie (GEPO-G/France). La même année, l’Institut national du cancer (Inca) se lance aussi dans l’aventure en mettant au point une « mission oncogériatrie ». Objectifs : « améliorer le niveau de connaissance, disposer d’un nombre suffisant de professionnels formés, obtenir que tous les patients de plus de 75 ans atteints d’un cancer bénéficient d’une évaluation gériatrique et informer sur les facteurs de risque ».
Pour se donner les moyens de ses ambitions, l’Inca a favorisé la naissance d’une quinzaine d’unités pilote de coordination en gériatrie. En juin, l’Inca devrait faire le point sur les avancées de l’oncogériatrie mais cette pratique a, semble-t-il, déjà fait ses preuves. Dans son rapport sur le prochain Plan Cancer, le Pr Jean-Pierre Grünfeld recommande en effet de « déployer sur tout le territoire, d’ici à 2011, les unités pilote » et de multiplier leur nombre par deux.
Il n’empêche, tous les septuagénaires atteints d’un cancer n’auront pas droit à cette prise en charge spécifique. « Face au nombre de cancers, l’offre de gériatres est trop modeste », explique le Pr Saint-Jean. C’est pourquoi les 15 unités pilote travaillent déjà à l’élaboration d’un outil de « triage » des patients âgés qui ne manqueront pas de se bousculer aux portes des services d’oncogériatrie.

Cécile Coumau

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