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Comment décrocher de l'addiction au porno

Ancien porno-dépendant, Florent Badou propose dans un ouvrage  une véritable méthode pour sortir de l’impasse. Rencontre avec l'auteur.

Comment décrocher de l'addiction au porno ©123RF Mawardi Bahar




L’addiction au porno ne vous tombe pas dessus d’un seul coup, elle s’installe progressivement. On s’habitue à son petit porno du soir pour s’endormir. Puis, on en reprend au réveil à cause de l’érection matinale. Au fil des mois ou des années, l’accoutumance vient sans que l’on s’en rende compte. C’est ce processus que Florent Badou décortique et raconte dans un livre Avant j'étais accro au porno (1). Ingénieur parisien de 32 ans, marié et père de deux enfants, addict au porno pendant 15 ans, il explique à Pourquoidocteur les effets pervers du porno et comment se libérer de cette addiction.

 

Comment se traduisait votre addiction au porno ?

Florent Badou : Par une envie irrépressible de me mettre sur Internet et de visionner des images pornographiques. Je pouvais me masturber devant jusqu’à cinq fois par jour. Certains porno-dépendants peuvent passer beaucoup plus de temps devant leur écran, parfois 4 heures.

Au réveil, sans envie, sans besoin, je commençais ma journée en me masturbant devant des vidéos pornos. C’était mécanique, une jouissance sans réel plaisir, s’accompagnant d’un sentiment de solitude, de honte et de culpabilité.

 

Pourquoi recommencer puisque vous n’y preniez plus de plaisir ?

Florent Badou : Pourquoi un fumeur fume-t-il  ? Pourquoi un alcoolique boit-il ? C’est compliqué…La masturbation et l’orgasme qui s’en suit ont un pouvoir anxiolytique et apaisant dû à la décharge d’endorphines. On est plus calme pendant un moment mais cela se paie au prix fort. Il faut augmenter la fréquence ou la dose, il faut recommencer. On vit cela en mode zombie. J’ai été accro à la pornographie et la masturbation pendant quinze ans. J’ai terriblement souffert de cette addiction. Aujourd’hui, je m’en suis libéré.

 

Quel en est le principe de votre méthode  ?

Florent Badou : Pour commencer, j’estime essentiel de comprendre pourquoi on veut s’en sortir et d’identifier pourquoi on retombe là-dedans. En caractérisant mieux les situations, on peut les anticiper et les prévenir.   J’ai voulu arrêter parce que je perdais tout contrôle sur ma vie. Je n’avais pas envie de me masturber en cachette au réveil alors que ma femme prenait son café. Je n’avais pas envie de voir des femmes et des hommes objets humiliés et dégradés. L’ennui et la fatigue me conduisaient à voir ces images. Je remplissais le vide, j’apaisais l’angoisse. Il fallait donc combler autrement le vide, apaiser différemment l’angoisse.

 

Comment vous y êtes-vous pris ?

Florent Badou : Le journaliste britannique Johann Hari affirme que « l’inverse de l’addiction n’est pas l’abstinence, mais le lien social. »J’ai fait un régime, je me suis mis à manger mieux, à faire du sport avec des amis, à reprendre confiance en moi…Cela m’a vraiment détourné de mes pulsions, il m’a fallu trois ans. Pour d’autres, le salut peut venir d’ailleurs, d’un investissement dans la culture, les animaux ou une association. Surtout, il ne faut pas perdre courage, l’amélioration est un processus lent mais on y arrive à condition de bien identifier les facteurs qui conduisent à la rechute et à les éviter. Rappelez-vous Pinocchio sur l’île des plaisirs : c’est lorsqu’il prend conscience de la nature de cette île et de ce qu’il est en train de devenir qu’il parvient finalement à s’échapper.

 

Une psychothérapie est-elle nécessaire ?

Florent Badou : On ne peut s’en sortir seul, il faut demander de l’aide. Le traitement classique de l’addiction au sexe passe effectivement par la parole avec l’aide d’un addictologue. Mais on peut aussi passer par un groupe de parole comme les Dépendants Affectifs et Sexuels Anonymes (DASA), qui fonctionne sur le modèle des Alcooliques Anonymes. Il y a aussil'ANPAA. Cela peut être efficace pour certains. En ce qui me concerne, ma psychologue a été ma femme, elle m’a beaucoup soutenu. Si on n’a pas de conjoint, ça peut être aussi un ami, l’important, c’est le soutien et les contrôles externes librement consentis.

 

Vous insistez sur les contrôles externes, de quoi s’agit-il ?

Florent Badou : De tout ce qui peut vous aider à maîtriser votre pulsion. Vous pouvez mettre un programme de contrôle parental sur l’ordinateur (comme le logiciel K9 Web Protection) qui vous empêche d’accéder aux vidéos pornos, un peu comme un joueur se ferait interdire de casino. Vous pouvez aussi changer de téléphone et choisir un appareil classique qui ne peut se connecter sur Internet. Si vous ne pouvez vous séparer de votre smartphone, il existe des solutions pour vous empêcher d’accéder à certaines applications pendant les heures de bureau (UBhind). Il existe même des applications qui envoient votre historique de navigation à quelqu’un que vous aurez choisi, une personne de confiance et qui vous accompagne dans ce défi (x3watch par exemple).Cela aide, ce n’est jamais infaillible. Ce qui est important c’est la volonté de persévérer dans une démarche d’amélioration continue.

 (1) Disponible sur Amazon et Kindle. Le site stopporn.fr complète cet ouvrage.

 

Méthodes pratiques
Le psychiatre et addictologue Marc Auriacombe (Université de Bordeaux) encourage la démarche de Florent Badou et l’écrit dans la préface de son ouvrage : « Dans le cas particulier de l’addiction à la pornographie, le livre de Florent Badou apporte des conseils, des suggestions et des méthodes très pratiques et accessibles. Chacun doit pouvoir trouver ce qui lui est adapté dans son cas particulier. L’enjeu thérapeutique, donc libératoire, est très bien décrit. La liberté induite par le contrôle externe librement consenti est une des bases de l’action thérapeutique au long cours ».

 

 
 

 

 

 

 

 

 

 

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Posté par Pourquoidocteur sur lundi 8 février 2016
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